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Page:Meulan - Essais de litterature et de morale.djvu/21

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LETTRE
d’une jeune personne à la douairière du Marais.


Quoique je n’aie pas l’honneur de vous connoître, madame, vous me pardonnerez de m’adresser à vous avec une confiance que m’inspirent naturellement les personnes de votre âge. Vous vous dites indulgente : c’est ce qui m’a déterminée ; car j’ai besoin de conseils, & je crois qu’il faut bien de l’indulgence pour donner un bon conseil à une jeune personne qui en a autant de besoin que moi. Je vais vous mettre au fait de ma position.

Je vis avec une mère aussi tendre que respectable ; elle n’a d’enfant que moi. Nous avons été riches & nous sommes pauvres. Tout le monde se fait une idée vague de la pauvreté ; mais bien peu de gens savent ce que c’est que d’en souffrir tous les jours, quand on a joui long-tems du superflu. Ma mère supporte nos malheurs avec plus de résignation que moi. J’ai du courage aussi, mais il ne vient que par moment : celui de ma mère me déchire le cœur. Je n’ai qu’un