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xlvi
introduction

Constantinople. Je crois cependant devoir faire remarquer que ce moment doit être antérieur à la croisade de 1204. Ce qui se passa alors dans la capitale de l’empire d’Orient n’était guère fait pour inspirer à l’auteur la peinture qu’il nous trace des rapports tout pacifiques de l’empereur grec et des barons de France. Avant cette époque il n’y a guère qu’un empereur à qui puissent s’appliquer les paroles du poète : c’est Alexis II. Dans cette hypothèse, le renouvellement daterait des dernières années de ce prince, représenté comme étant déjà un vieillard, ou des années qui suivirent sa mort. Alexis II mourut en 1180. Tout ce qu’on peut dire de plus précis, c’est que le renouvellement date du dernier quart du xiie siècle, et les arguments très incertains qu’on peut tirer de la langue et de la versification n’y contredisent pas.

La tendance, si visiblement religieuse et morale de la fin du poème et certains détails, tels que la citation, en partie textuelle[1] d’un verset des Psaumes, au § 671, semblent autoriser une autre conclusion qui a son importance. C’est que l’auteur du renouvellement devait être, non pas un simple jongleur, mais un clerc. Bien d’autres clercs, tant au nord qu’au midi de la France, ont composé en langue vulgaire des poésies profanes[2].

Ce serait peut-être ici le lieu de chercher à déterminer la patrie du renouveleur. Mais c’est là un point qui ne peut être éclairci qu’à la suite d’un examen détaillé de la langue du renouvellement. Nous consacrerons plus loin à cette recherche un chapitre spécial.

  1. Dans ma traduction, j’ai remis toute la citation en latin.
  2. Voir ce que je dis à ce sujet dans l’introduction à la chanson de la croisade albigeoise, pp. xxxiv et xl.