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Page:Meyerson - Identité et réalité, 1908.djvu/392

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nit la forme et l’expérience la matière de ces lois[1]. » Dans un autre passage, Whewell, après avoir exposé la même théorie, insiste sur ce que, « sans les enseignements de l’expérience les lois du mouvement n’auraient jamais pu être connues d’une manière distincte[2] ». Et, bien qu’il se soit parfois exprimé d’une façon un peu contradictoire[3] et qu’il n’ait pas appliqué cette méthode à la conservation du poids (qu’il considérait, ainsi que nous l’avons indiqué, comme entièrement apriorique, parce que le concept de poids était pour lui, comme pour Kant, inclus dans celui de substance[4]), on ne saurait, semble-t-il, lui contester le mérite d’avoir, le premier, indiqué clairement la nature particulière des énoncés qui se déduisent du principe d’identité. La thèse de Whewell a été bien souvent reprise plus tard, avec les corrections nécessaires. MM. Milhaud, Le Roy, Wilbois, Kozlowski, parmi nos contemporains, l’ont exposée. Cette solution est cependant loin d’avoir attiré toute l’attention qu’elle mérite. Même les doutes au sujet de l’origine des principes de conservation persistent. M. Poincaré exprime certainement le sentiment général des savants contemporains quand, voulant établir pour quelle raison le principe de la conservation de l’énergie « occupe une sorte de place privilégiée », c’est-à-dire pourquoi nous lui attribuons une valeur dépassant ses fondements expérimentaux, il recherche les « petites raisons » de cette apparente anomalie[5]. M. Helm, également à propos de la constance de l’énergie, déclare qu’il convient de bannir de la science, pour les confiner dans la métaphysique, toutes les considérations se fondant sur le principe de causalité[6].

Pour nous, on l’a vu, le fait que les principes de conservation constituent une classe d’énoncés particulière, découlant du principe de causalité, est d’une importance capitale, puisqu’il nous apparaît comme étant de nature à jeter une vive lumière sur la manière dont se constitue la science et même

  1. Whewell. The Philosophy of the Inductive Sciences. Londres, 1840, p. XXVII.
  2. Ib., p. 239.
  3. Cf. par exemple, ib., p. 213 où il a l’air d’affirmer que l’inertie aurait pu être découverte indépendamment de l’expérience et p. XXIV où la cinématique apparaît comme entièrement a priori.
  4. Ib., p. 30 et 395.
  5. H. Poincaré. La science et l’hypothèse. Paris, s. d., p. 157.
  6. Helm. Die Lehre von der Energie. Leipzig, 1889, p. 41.