Page:Michaud - Biographie universelle ancienne et moderne - 1811 - Tome 4.djvu/330

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géomètre qui était incontestablement un des plus forts de son siècle. Pourquoi faut-il qu’il ait été l’écueil de l’amitié fraternelle ! La justesse d’esprit et la finesse d’aperçus qui avaient porté Jacques Bernoulli à cultiver le calcul différentiel, lui firent concevoir tout ce qu’on pouvait attendre du calcul des probabilités, que Pascal et Huygens n’avaient encore considéré que par rapport aux jeux ; il reconnut que ce calcul pourrait s’appliquer à des questions intéressant la morale et la politique, et, dans diverses thèses qu’il fit soutenir par ses élèves (car il était professeur), il en étendit beaucoup les principes et les applications. Son neveu, Nicolas Bernoulli, réunit ses thèses dans un traité spécial, sous le titre Ars conjectandi, qu’il publia en 1715, et il y joignit un Traité des Séries, qui fut également composé par Jacques Bernoulli, sous la forme de thèses ; on a réimprimé ces derrières dans la collection de ses Œuvres, publiée en 1744. On y trouve aussi les notes rapides qu’il composa en revoyant les épreuves d’une édition de la Géométrie de Descartes, imprimée à Baie, en 1695. La vie de Jacques Bernoulli paraît avoir été semée de peu d’événements. De retour dans sa patrie, il y obtint, en 1687, la chaire de mathématiques de l’université. Lorsque l’académie des sciences de Paris, à son renouvellement, en 1699, eut reçu la permission de s’agréger, sous le nom d’associés étrangers, huit des plus célèbres savants de l’Europe, Jacques Bernoulli et son frère furent du premier choix. Leibnitz, qui sut apprécier de bonne heure les talents de ces deux grands géomètres, s’empressa de les associer à l’académie de Berlin, à la formation de laquelle il avait présidé. Un tempérament bilieux et mélancolique donnait à Jacques Bernoulli une grande ardeur et une grande ténacité dans ses travaux ; sa marche était lente, mais sûre ; il conservait toujours une modeste défiance de lui-même, et sa douceur fut bien prouvée par le ton de ses lettres dans la dispute qu’il eut avec son frère. On dit qu’il réunissait au talent des mathématiques celui de la poésie ; qu’il faisait des vers latins, allemands et français. La facilité de composer des vers latins, au moins passables, pour le goût et les oreilles modernes , a été commune à tant d’auteurs, qu’il y a peu de gloire à en tirer ; quant aux vers français, il ne paraît point qu’il en soit resté de Jacques Bernoulli. Il mourut le 16 août 1705, âgé de cinquante-un ans. Il avait demandé que, pour faire allusion à ses espérances d’une vie future, on gravât sur son tombeau une spirale logarithmique, courbe qui se reproduit sans cesse dans ses développées, et qu’on y joignît cette devise : Eadem mutata resurgo. Il s’était marié à l’âge de trente ans, et il a laissé un fils et une fille. Son éloge a été fait par Fontenelle. Ses ouvrages sont : I. Jacobi Bernoulli, Basileensis , opera, Genève, 1744, in-4°, 2 vol. II. Jacobi Bernoulli Ars conjectandi opus posthumum, accedit tractatus de seriebus infinitis, Bâle, 1713, in-4°., I vol. La première partie de cet ouvrage a été traduite en français par L. G. F. Vastel, Caen, 1801, in-4°., I vol. M. Bossut a fait réimprimer, dans le Journal de Physique, du mois de septembre 1792, une lettre de Jacques Bernoulli, qui n’a point été insérée dans les Œuvres indiquées ci- dessus. L — x.

BERNOULLI (Jean), frère du précédent, naquit à Bâle, le 27 juillet 1667. Lorsqu’il eut terminé ses études, on l’envoya à Neuf-