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Page:Michaud - Biographie universelle ancienne et moderne - 1811 - Tome 84.djvu/49

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rer qu’ils réfléchiront sur des conséquences si contraires à leurs intérêts. » Cet avis, exprimé avec feu, entraîna le roi et la majorité du conseil. Des députés furent immédiatement envoyés auprès des Anglais, pour essayer ce que pourrait sur eux le langage de l’humanité. Ils ne voulurent rien entendre. Alors on se mit en devoir de les combattre ; mais ils disparurent promptement. Ainsi furent sauvés les deux princes par la générosité de l’infant Théodose. Vers la fin de l’année 1651, la guerre entre le Portugal et la Castille était suspendue, et ne se poursuivait qu’avec une extrême lenteur. Théodose, qui touchait à sa dix-huitième année, voyant cette inaction avec un vil regret, conçut le projet d’aller, à l’insu même de son père, se mettre à la tête de l’armée, pour combattre les Castillans. Déjà l’amour de la gloire commençait à fermenter dans son jeune cœur. Plein du souvenir de ses ancêtres, il lui tardait de les imiter sur le champ de bataille ; et d’ailleurs, les gentilshommes qui l’entouraient se plaisaient à l’entretenir dans ces dispositions. Enfin, ne pouvant supporter l’oisiveté il partit de Lisbonne, emmenant deux seigneurs de sa maison, et se dirigea vers l’Alentejo, d’où il s’empressa d’appeler auprès de lui les principaux chefs de l’armée. Bientot il parut dans Elvas, à la tête d’un détachement d’infanterie et de cavalerie, et déjà il se disposait à se jeter sur la Castille, lorsque son père, informé d’une démarche qu’il avait vue avec déplaisir, lui envoya l’ordre de revenir à Lisbonne. Il obéit, avec douleur. Revenu auprès du roi, il en reçut un froid accueil. Pour le consoler, son père le créa généralissime de ses armées. Mais que lui importait ce vain titre, puisqu’il ne lui était pas permis de s’en montrer digne dans les combats ? Quelque temps après, craignant l’ambition de son fils, le roi, l’écarta des affaires. L’infant, doué d’une ardente sensibilité, fut attéré par ce nouveau coup ; il murmura, il se plaignit. Alors il devint mélancolique et sombre. Sa santé s’altèra et bientôt en proie à une fièvre lente, à des vomissements de sang contre lesquels tous les secours de l’art furent impuissants ; il mourut le 15 mai 1653. La nation entière pleura le trépas d’un prince aussi brave, aussi vertueux. F—a.

THÉOFRIDE, ou Théofroy vingt-quatrième abbé d’Epternac (ordre de saint Benoît, au diocèse de Trèves), fut un des hommes les plus remarquables de son temps. Il entra dès sa plus tendre jeunesse à l’abbaye d’Epternac, et l’on prétend qu’il s’y trouvait déjà en 1031, lors de la translation des reliques de saint Willibrod, apôtre de la Frise, par l’abbé Humbert. Il y étudia avec ardeur les lettres sacrées et profanes ; acquit une parfaite connaissance des langues latine, grecque et même hébraïque. Sa science et sa piété lui méritèrent l’estime et l’affection de l’abbé Régimbert, sons lequel il vécut trente ans simple religieux. En 1078, cet abbé le choisit pour coadjuteur, mais, étant mort, trois ans après, Théofride rencontra un compétiteur, et fut obligé d’aller à Rome demander justice. Le pape Grégoire VII la lui rendit, en le maintenant en possession, par décision du 18 novembre 1083. Théofride gouverna son abbaye avec une grande sagesse, s’occupant sans cesse de l’instuction de ses religieux, et de leur bien spiri-