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ADH

ignorant les projets de son perfide vizir, ordonna à sa garde de repousser le peuple qui accourait aux portes de son palais, pour le réveiller sur le bord de l’abime. Enfin, le premier vendredi de moharrem 567 (8 septembre 1171), le nom de Mostadhi fut solennellement substitué dans la khothbah ou prière publique à celui d’Adhed, et cet acte de souveraineté mit fin à la dynastie des fathémides, qui avait duré 272 années lunaires ou 261 années solaires. Cette révolution n’excita aucun trouble. Elle fut même ignorée d’Adhed-Ledin-Allah, qui mourut cinq jours après, se croyant encore calife. (Voy. Saladin, Mostadhi et Obeid-Allah al Mahdy.) Les jours de ses enfants furent respectés. Dépouilles de leurs biens, ils reçurent de modiques pensions et vécurent dans l’obscurité. A-t.


ADHÉMAR DE MONTEIL (Lambert d’), prince d’Orange, fut le chef de l’ancienne et illustre famille de ce nom. On voit, par un acte passé à Metz, qu’il épousa dans cette ville, le 9 janvier 785, Madeleine de Bourgogne. Il fut faut duc de Gènes par l’empereur Charlemagne, en 800, pour récompenser de ses services dans les guerres que cet empereur eut à soutenir contre les Sarrasins qui ravageaient l’Italie. Adhémar les chassa de cette contrée, et plus particulièrement de la ville de Gènes, les poursuivit en Corse, où ils s’étaient réfugiés, et fit la conquête de cette ile, après les avoir battus sur terre et sur mer. Il s’empara de tous leurs vaisseaux, et en coula à fond quatorze des plus considérables. Il fut suivi dans cette expédition par trois de ses petits-neveux, fils de Hugues Adhémar, baron de Hombert en Albigeois ; tous les trois périrent dans différents combats livrés aux Sarrasins. — Adelme Adhémar, religieux de St-Benoit, au 9e siècle, fut chapelain de Charlemagne. Il a écrit une Histoire de France, qui a été transcrite par Aimon, et incorporée dans la sienne, comme il en fait l’aveu au livre 4e (Vossius, de historiæ latine. etc, ). — Aimar d’Adhémar, petit-fils de Lambert d’Adhémar, duc de Gènes, fut élu archevêque de Mayence en 820. ─ D’autres individus du même nom se distinguèrent dés lors dans les armes et dans l’Église. M-d j.


ADHÉMAR DE MONTEIL (Aimar), évêque du Puy en Velay, de la même famille que les précédents, avait embrassé le métier des armes avant d’entrer dans l’état ecclésiastique, et fut sacré évêque le 5 mai 1061. Ce fut lui qui, le premier, au concile de Clermont, tenu par Urbain II, en 1095, se présenta pour demander la croix. Le pape le nomma son légat ; auprès de l’armée des croisés. Adhémar, à la tête d’un clergé nombreux, et d’une foule de guerriers accourus sous ses drapeaux de l’Auvergne, de la Provence, du Limousin, partit pour la terre sainte avec Raimond, comte de Toulouse. Arrivé sur les frontières de l’empire grec, après avoir traversé les Alpes et la Dalmatie, il fut surpris par les Albanais, et courut risque de perdre la vie. Alexis Comnène, assis sur le trône de Constantinople, redoutait les entreprises des croisés ; il essaya tour à tour les promesses et les menaces pour intimider ou corrompre les principaux chefs des Latins. Après de longues contestations, pendant lesquelles les Grecs et les Francs en vinrent plusieurs aux aux mains, les chefs de la croisade jurèrent foi et hommage, à Alexis ; Adhémar se soumit comme les autres, et c’est sans fondement que Voltaire assure que ce prélat conseilla aux croisés de commencer la guerre sainte par le siége de Constantinople. Adhémar, en quittant la capitale de l’empire grec, se rendit au siége de Nicée, ou il réussit, par ses discours et son exemple, à entretenir l’union, la discipline et la bravoure dans une armée ou l’on comptait 600,000 combattants. Il se distingue dans plusieurs combats livrés aux Sarrasins, maîtres de l’Asie Mineure ; mais ce fut surtout au siége d’Antioche qu’il montra toutes les qualités d’un chef habile et le génie d’un politique profond. Les croisés, qui s’étaient rendus maîtres de la ville par surprise, se trouvèrent bientôt livrés à la plus horrible famine, et assiégés à leur tour par une armée innombrable de Sarrasins commandés par Kerboga, prince de Mossoul. Ils n’avaient plus d’espérance que dans la protection du Dieu pour lequel ils avaient pris les armes ; tout à coup, le bruit se répand dans la ville qu’on a découvert la lance dont fut percé le flanc du Sauveur ; et bientôt une lance, trouvée sous le maitre-autel de l’église de St-Pierre, est montrée en triomphe aux soldats de Jésus-Christ. Cette vue ranime leurs forces et leur cou rage ; ils brûlent de combattre les musulmans. Malgré le silence des historiens contemporains, on est porté à croire qu’Adhémar ne fut point étranger à cette pieuse fraude, qui fut reconnue quelque temps après, mais qui sauva l’armée des croisés. Ils firent une sortie dans laquelle ils tuèrent 100,000 musulmans, et rapportèrent un immense butin. L’évéque Adhémar était au centre de l’armée, portant la lance merveilleuse, et exhortant les croisés à vaincre ou à mourir pour Jésus-Christ. Au milieu de la bataille, plusieurs cavaliers vêtus de blanc parurent tout à coup sur les montagnes voisines ; Adhémar éleva la voix, et dit à ses compagnons que les martyrs SS. Georges et Démétrius venaient combattre avec eux ; les paroles d’Adhémar, répétées de rang en rang. redoublèrent la bravoure des chefs et des soldats, et décidèrent la victoire. Dès lors les chrétiens n’eurent plus d’ennemis à combattre pour arriver dans la Palestine. Adhémar mourut quelque temps après (1er août 1098), à Antioche, atteint de la peste, qu’il avait gagnée en visitant les malades. Il fut vivement regretté de l’armée, qui, après sa mort, se livra à des discordes funestes, et souffrit tous les maux qu’amènent l’imprévoyance, la désunion et l’indiscipline. Guillaume de Tyr et tous les historiens des croisades s’accordent à louer sa modération, son courage et son éloquence ; le Tasse nous le peint comme un pontife saint et révéré ; usant du privilège de la poésie, il le fait mourir au siége de Jérusalem, d’un coup de flèche lancée par Clorinde ; tandis que l’histoire, qui le représente comme un autre Moise, le fait mourir d’une épidémie, avant qu’il eût pu voir la terre promise. — Son frère, Guillaume-Hugues d’Adhémar, prieur de Donzères, l’avait suivi à la terre sainte, et mourut à Jérusalem en 1099. ─ Son