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AGA

présomptueux des Athéniens. Alcibiade voulut avoir une maison décoré par cet artiste. Démosthène dans son discours contre Midas, donne à entendre qu’Agatharque profita de son séjour dans cette maison pour séduire la maîtresse d’Alcibiade, et que celui-ci, revenant chez lui dans un moment où on ne l’attendait pas, ne put douter de l’outrage qu’il avait reçu ; mais il ne se vengea de son rival qu’en le retenant prisonnier, pour le forcer à finir promptement les ornements de sa maison, et, lorsqu’ils furent terminés, il le renvoya comblé de riches présents. Plutarque raconte cette dernière partie de l’aventure dans la vie d’Alcibiade et dans celle de Pélopidas ; mais il n’attribue l’emprisonnement d’Agatharque qu’a l’impatience qu’Alcibiade éprouvait de voir finir sa maison. On peut conclure des rapports d’Agatharque avec Zeuxis et Alcibiade, qu’il vivait vers la 95e olympiade, 400 ans avant J.-C. ; mais ce calcul ne s’accordee plus avec ce que Vitruve rapporte du même artiste. Suivant ce dernier auteur, Agatharque fut le premier qui peignit des décorations pour le théâtre, idée qui lui fut donnée par le poëte Eschyle, dont les conseils firent faire de tels progrès a l’artiste, qu’il composa un traité sur cette partie de l’art. Eschyle est mort 480 an avant J.-C. ; il avait quitté la Grèce six ans auparavant ; Agatharque devait en avoir au moins vingt à cette époque, et ce n’eût été qu’a près de cent ans qu’il aurait pu se trouver le rival d’Alcibiade et le contemporain de Zeuxis : cette contradiction autorise à penser qu’il y a eu deux Agatharque, dont l’un florissait 480 ans ou environ avant J.-C., et l’autre 80 ans plus tard. L-S-e.


AGATHE (Sainte), vierge et martyre, née a Palerme ou à Catane, car ces deux villes se disputent l’honneur de lui avoir donné le jour. Noble, belle, et d’une famille illustre, Agathe s’était consacrée a Dieu dès ses plus tendres années. Quintianus, homme consulaire, et gouverneur de Sicile, instruit de la beauté et des richesses de cette jeune vierge, se flatta de pouvoir satisfaire sa passion et son avarice, au moyen des édits que l’empereur Déce avait rendus contre les chrétiens. Il ordonna qu’on se saisit d’Agathe, et qu’on la conduisit devant son tribunal à Catane. La jeune vierge, se voyant livrée a ses persécuteurs, fit cette prière : « Jésus-Christ, souverain Seigneur de toutes choses, vous voyez mon cœur, vous savez quel est mon désir, soyez le seul possesseur de tout ce que je suis. » Quintianus, irrité de cette fermeté, fit conduire Agathe en prison, après lui avoir fait meurtrir le visage. Le lendemain, ce juge inique, trouvant en elle la même résistance, lui fit souffrir la plus horrible question ; et, furieux de se voir vaincu par sa patience héroïque, il ordonna qu’on lui arrachât le sein et qu’on la fit rouler toute nue sur des charbons ardents. Agathe, traînée en prison après ce supplice, expira en finissant une prière a Dieu, l’an 251 de J.-C. On a deux panégyriques de Ste. Agathe, écrits, l’un dans le 7e siècle, par St. Adelme d’Angleterre ; l’autre, dans le 9e siècle, par St. Méthodius, patriarche de Constantinople et en outre deux hymnes composés en son honneur par le page Damase et par St. Isidore de Séville. Il existe au musée du Louvres un beau tableau de Sébastien del Piombo, qui représente le martyre, de Ste. Agathe. B-p.


AGATHÉMÈRE, géographe grec. On ignore l’époque à laquelle il a vécu ; mais il est certain, qu’il est postérieur à Ptolémée, et probablement du 3e siècle de notre ère. Nous avons de lui un abrégé de géographie, intitulé : Hypotytoses geographicæ, dont la première édition est de Tennulius, en grec et latin, Amsterdam, 1671, in-B°. On le trouve aussi dans un recueil d’anciens géographes, que Jac. Granovius a fait imprimer à Leyde, in-4o, en 1697 et 1700 ; et enfin, dans les Geographi minores, vol. 2. Ce petit ouvrage, qui contient plusieurs particularités échappées à Strabon et à d’autres géographes célèbres, semble nous être parvenu dans un état très-imparfait. C’est une série de leçons, dictées a un certain Philon ; mais les choses déjà exposées dans le 1er livre reviennent avec tant de contradictions et d’obscurités dans le 2e, que nous ne saurions regarder cette dernière partie comme étant véritablement du même auteur : ce sont probablement deux extraits du même cours de géographie, donné par Agathémère. Le 1er livre pourrait même, à la rigueur, être considéré comme composé de deux fragments ; car, dans les cinq premiers chapitres, on trouve un résumé des différentes mesures générales et particulières, données par des auteurs antérieurs a Ptolémée ; dans le 6e, l’auteur s’adresse, par une sorte de préface, à Philon, dont le nom n’est pas prononcé dans les cinq chapitres précédents. Une question aussi minutieuse sur un simple abrégé pourrait paraître déplacée, si l’on ne savait pas que le déplorable naufrage de l’antiquité a donné de l’importance aux moindres fragments qui nous sont restés. M-B-n.


AGATHIAS ; poëte et historien, né a Myrine, ville éolienne de l’Asie, vint a Constantinople, où il s’attacha à la profession du barreau. Il a continué l’histoire de Procope de Césarée, depuis l’an 532 jusqu’à l’an 559 de notre ère. Cette histoire, en cinq livres, a été publiée, pour la première fois, par Bon. Vulcanius, Leyde, 1594, in-4o ; il fit imprimer, la même année, sa traduction latine et ses notes, également in-4o ; on a réimprimé le tout au Louvre, en 1660, in-fol., pour faire suite à la Byzantine. Cet ouvrage a été traduit en français par le président Cousin, dans le tome second de son Histoire de Constantinople. Agathias avait fait un recueil des épigrammatistes grecs qui avaient écrit depuis Auguste, pour faire suite aux Anthologies précédentes : ce recueil ne nous est pas parvenu, mais il se trouve en grande partie dans les Anthologies de Planude et de Constantin Cephalas. Il nous reste d’Agathias un assez grand nombre d’épigrammes, recueillies par Brunch dans le 3e volume de ses Analecta : ses vers valent mieux que sa prose ; sa diction est prolixe, peu naturelle, et remplie de termes spécialement consacrés à la poésie. Il est encore plus difficile de lui pardonner son peu de jugement et sa légèreté d’esprit. L’envie d’étaler toute son érudition l’entraîne toujours hors