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les mêmes vexations et subissaient la même servitude ; circonstance heureuse pour la politique de St-Pétersbourg, et qui pouvait servir de prétexte à une nouvelle conquête. En effet, après avoir passé une partie de l’année 1832 à forcer les chefs réfractaires à payer le tribut qu’ils devaient au royaume, et pacifié le Khoraçan par la prise des deux redoutables forteresses d’Amiradah et de Koochen, le fils du roi de Perse se disposait à faire, avec l’aide de la Russie, une guerre sérieuse aux Usbeks. Il avait une armée considérable, l’argent seul manquait ; et, à cette occasion, Burnes raconte dans ses Voyages au Bockara, que dans l’entrevue qu’il eut avec Abbas-Mirza, quelques jours après son dernier succès dans le Khoraçan, le prince, ayant abordé les sujets politiques, insista sur les incomparables avantages (incomparable advantage) qu’il y aurait pour l’Angleterre à soutenir la Perse, et pria le voyageur de vouloir biens exposer à ses concitoyens cette situation difficile. Il ajouta qu’il n’avait pris récemment les armes que pour supprimer la vente et la captivité de ses sujets par la tribu des Usbeks, « Le motif était digne de louanges, continue Burnes ; mais remarquez la conclusion : J’ai donc des titres a l’assistance de la Grande-Bretagne, disait le prince. En effet, si vous dépensez annuellement des milliers pour abolir le commerce des esclaves en Afrique, je mérite votre appui dans ce pays où vous avez les mêmes raisons d’exercer votre philanthropie. » Du reste, Abbas-Mirza n’eut point le temps d’exécuter le projet qu’il avait conçu et qui promettait d’heureux effets. Ses derniers jours furent attristés par les désastres du choléra, qui vint, a cette époque, affliger une grande partie du globe ; il mourut en 1833, avant le roi son père ; événement grave pour la Perse, qui pouvait craindre de voir s’élever dans, son sein une guerre civile, une guerre de succession ; mais grave aussi pour l’Angleterre et la Russie, à chacune desquelles il importait de faire choisir pour héritier du trône un homme qui lui fut favorable. L’Angleterre, qui avait alors avec la Perse un secret traité d’alliance défensive contre la Russie, s’entendit cependant, après quelques tergiversations, avec sa rivale, convint que leurs intérêts étaient les mêmes à Teheran, et le fils d’Abbas-Mirza, Mohamed-Miraa, fut déclaré héritier du trône. Alors Feth-Ali descendait également dans la tombe. — On consultera avec fruits, sur cette époque, L’Hstoire de Perse (the History of Persia), par Malcolm, l’Asiatie Journal, l’Annual register, l’annuaire historique universel, la Russie dans l’Asie Mineure, par Fonton, le Voyage en Perse de Drouville, le Voyage en Arménie et en Perse, par Amédée Jaubert. Les annales du règne de Feth-Ali ont été également écrites en langue nationale par Nedjif-Couly-Abdurrizzak, et traduites en anglais sous ce titre : The Dynasty of the Kadjars, translated from the original Persian, manuscriptt présented by his Majesty Faith-Ali-Shah to sir Harford Jones Brydges. H. D-z.


ABBASSA (A’bbaçah), sœur d’Haroun-al-Réchyd, 5e calife abbaside. Sa beauté, ses talents pour la poésie, et surtout ses malheurs, la rendirent célèbre. Elle fut donnée en mariage, par son frère, au grand vizir Giafar (Dja’far-ben Yahya), chef de la famille des Barmécides, et ami du calife ; mais Haroun y mit l’étrange condition qu’ils ne se considéreraient point comme époux, et qu’ils borneraient leur liaison à la simple amitié. On a prétendu que le calife leur fit cette défense parce qu’épris d’Abbassa, et trop pieux pour se livrer a un commerce incestueux, il ne voulait pas qu’un autre éprouvât le bonheur auquel lui-même ne pouvait prétendre, D’autres donnent à cette défense un motif moins odieux : ils disent que le calife n’avait marié sa sœur à son favori que pour permettre a Giafar l’entrée du sérail, et lui faire ainsi partager tous ses plaisirs. Quoi qu’il en soit de ce caprice singulier, la jeunesse et une passion mutuelle eurent plus de pouvoir que la volonté tyrannique du monarque. Abbassa devint mère, et donna le jour à un fils, que Giafar et elle envoyèrent élever secrètement à la Mecque (quelques écrivains disent même qu’elle accoucha de deux jumeaux). Le fait parvint a la connaissance du calife, qui fit périr Giafar avec tous les Barmécides, et ne se montra pas moins cruel envers sa sœur, en la chassant de son palais et en l’exposant a toutes les horreurs de l’indigence. Dans un pèlerinage qu’il fit à la Mecque, Haroun témoigna le désir de voir l’enfant, sans doute pour lui faire aussi ressentir les effets de sa haine ; mais on parvint à le soustraire à ses regards. L’atroce conduite d’Haroun parait une preuve bien forte qu’il avait regardé la malheureuse Abbassa avec d’autres yeux que ceux d’un frère. Plusieurs années après, une femme, qui l’avait connue pendant sa prospérité, la rencontra et lui demanda ce qui lui avait attiré son infortune. « J’ai eu autrefois quatre cents esclaves, lui répondit Abbassa ; je ne possède plus maintenant que deux peaux de moutons, dont l’une me sert de chemise, et l’autre de robe. J’attribue mes malheurs à mon peu de reconnaissance pour les bienfaits de Dieu. Je fais pénitence de ma faute, et je vis contente. » La femme lui fit présent de 500 dragmes d’argent, et Abbassa montra, dit d’Herbelot, autant de joie que si elle eût été rétablie dans son premier état. Parmi les vers d’Abbassa que les Arabes ont conservés, on remarque ceux que Ebn-Abou-Hadjelah rapporte dans son ouvrage intitulé Saba. Ils sont adressés a Giafar, et annoncent un cœur passionné. D-t.


ABBATE (Niccolo dell’), peintre, né à Modène en 1500, fut élève, non pas du Primatice, comme on l’a cru, mais de Ruggiero Buggieri que le Primatice amena avec lui en en France, et qui l’aida à orner de peintures le château de Fontainebleau. Il est vrai que dell’ Abbate a souvent rappelé le Primatice dans les compositions qu’il a laissées à Bologne. Toute la famille de Niccolo, comme celle des Bassan et quelques autres, était vouée aux arts, et de père en fils, ils furent tous des artistes recommandables. On cite avec honneur, parmi les peintres modénois, Jean son père, Pierre-Paul son frère, Jules-Camille, son fils, Hercule, fils de Jules-Camille, et Pierre-Paul, fils, d’Hercule. Les principales fresques de Niccolo