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d’y faire des modifications qui le mirent en harmonie avec mœurs de l’Allemagne, et de donner aux autorités administratives et judiciaires une organisation conforme à celle de la France. Les discours qu’il prononça dans ces conférences obtinrent les suffrages des plus profonds jurisconsultes[1], et notamment du célèbre avocat M. Rehbetg, qui délcara que, parmi tous ceux de ses compatriotes qui avaient écrit sur la législation française, Almendingen seul l’avait envisagée sous toutes ses faces et dans toutes ses conséquences. Nommé, en 1813, membre de la commission de législation de Nassau, il proposa d’utiles réformes dans la procédure, la publicité des audiences et l’établissement de justices de paix, projets auxquels les événements politiques empêchèrent de donner suite immédiatement, mais qui ont été adoptés plus tard. L’année suivante, il publia un ouvrage intitulé : le Passé, le Présent et l’Avenir de l’Allemagne, envisagés sous le point de vue politique (Wisbaden), qu’il avait composé dans le but de défendre la conduite tenue par les petits États de la confédération du Rhin. Cette production remarquable, où il jugea les hommes et les choses avec une sévère impartialité, et heurta de front quelques-unes des opinions les plus accréditées, devint l’objet d’une foule d’attaques, et lui attira l’inimitié de plusieurs grands personnages. En 1816, lors de la réorganisation de l’ordre judiciaire, il obtint la vice-présidence du tribunal aulique de Dillembourg, et bientôt après il fut nommé conseiller d’État. Longtemps auparavant, il avait plaidé pour les mineurs d’Anhalt-Schaumbourg contre le prince d’Anhalt-Bermbourg, dans une affaire relative à la validité d’une donation. Ce procès, qui avait été jugé en première instance par le tribunal de Halberstadt, devant être porté en appel à l’une des cours supérieures de la Prusse, Almendingen céda aux vœux de la mère et tutrice de ses clients, et se rendit à Berlin pour y soutenir leurs intérêts ; ce fut en 1819, peu de temps après que la diète eut adopté les fameuses résolutions du congrès de Carlsbad, et au moment où la réaction du parti absolutiste se manifesta avec le plus de violence. Comme il importait à ses clients que leur cause fut jugé en dernière instance par la cour de révision des provinces rhénanes, et non par celle de Berlin, Almendingen se pourvut à cette fin par-devant le ministre de la justice, qui avait le droit de désigner la cour qui en connaîtrait. Toutes ses démarches pour obtenir le renvoi qu’il désirait étant restées infructueuses, il tenta un dernier moyen : ce fut la publicité. Il fit imprimer à Brunswick une histoire du procès de la famille d’Anhalt, dans laquelle il se livrait à une critique acerbe de la législation prussienne, et notamment de la disposition qui laissait le choix de la cour d’appel à la discrétion d’un ministre[2]. Le gouvernement, qui vit dans cet écrit une provocations au mépris des lois existantes, ordonna des poursuites contre l’auteur et le fit garder dans son logement. En vain allégua-t-il sa qualité d’étranger, en vain dit-il que son ouvrage avait été publié hors de la Prusse : il fut déclaré justiciable de la chambre de justice, mais obtint la permission de partir, en fournissant une caution de 4,000 francs. De retour à Dillembourg, il établit ses moyens de défense et les envoya au tribunal de Berlin, qui le condamna à un an d’emprisonnement dans une forteresse. Cet arrêt ne fut pas exécuté, parce que le tribunal aulique de Dillembourg refusa d’y apposer son exequatur ; mais le gouvernement de Nassau remercia Almendingen, en lui conservant ses appointements à tître de pension. Profondément affligé de cette destitution, et condamné à une peine qu’il regardait comme infamante, il devint mélancolique, rédigea une justification, mais n’eut pas la consolation de la voir publiée, car aucun imprimeur n’osa s’en charger. Depuis cette époque (1822), il ne sortit plus de sa chambre, et se refusa même à la société de ses samis. Il mourut le 16 janvier 1827. — On a de lui trente et un ouvrages, parmi lesquels se distinguent, outre ceux que nous avons cités : 1o  de l’Origine de la guerre et de son Influence sur la civilisation, 1788 ; 2o  sur les Progrès et la Décadence des sciences, 1789 ; 3o  Recherches sur les droits et la forme de la diète germanique pendant la vacance du trône impérial, 1782 ; 4o  Essai philosophique sur les lois pénales de la république française, 1798 ; 5o  sur les Rationes Domesticæ des Romains du temps de la république, 1801 ; 6o  sur l’Imputation légale et ses rapports avec l’imputabilité morale, 1804 ; 7o  Recherches sur la nature des crimes et des peines, 1804 ; 8o  Essais pratiques sur la métaphysique du procès civil, 1806 ; 9o  Métaphysique du procès civil, 1808 ; 10° Mémoire sur la jurisprudence et l’économie politique, 9 vol. (1809-1812), dont les trois derniers contiennent une réimpression de ses discours sur le code Napoléon. Toutes les œuvres d’Almendingen sont en allemand, excepté le no 3, qui est en français. M-a.


ALMERAS (le baron Louis), général français, né le 15 mars 1768, à Vienne en Dauphiné, fut élève des ponts et chaussées, et s’enrôla, en 1791, dans un bataillon de volontaires nationaux du département de l’Isère, où de sergent-major il devint capitaine. En 1795, il fut aide de camp du général Cartaux, qu’il accompagna sous les murs de Toulon. On trouve dans les mémoires de Bonaparte publiés par Montholon un brillant éloge de la valeur qu’Almeras déploya alors contre une sortie de la garnison. Devenu adjudant général, il fut employé à l’armée des Alpes. Se trouvant à la tête d’un poste de 200 hommes, il se vit tout à coup enveloppé par 1,500 Piémontais, qu’il repoussa avec beaucoup de courage et de présence d’esprit, Almeras fut ensuite employé dans le département du Gard, où il eut a combattre quelques rassemblements de royalistes

  1. Ces discours ont été publiés en 3 vol. in-8o ; Glessen. 1812.
  2. Voici le titre de cet ouvrage, qui indique suffisamment l’esprit dans lequel il a été rédigé : Histoire du procès entre la branche aîné et la branche cadette de la maison princière d’Anhalt-Bermbourg, sur la validité de la donation du château de Zeitz, du village de Belissen et des terres d’Aschersleben ; avec des observations sur l’interprétation littérale des lois, sur la justice rendue à huis clos, et sur la bureaucratie en matière de procès, 2 vol. in-8o, 1821 et 1821