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ANDREHAN, ENDREGHEN, ANDENEHAM (Arnoul, sire d’), maréchal de France, sous les rois Jean et Charles V, se distingua contre les Anglais, et obtint la faveur du roi Jean, auquel il s’était attaché lorsqu’il n’était encore que duc de Normandie. Ce prince lui fit assigner une rente sur le trésor royal, en 1343, et le nomma, six ans après, capitaine souverain du comté d’Angoulême. La trêve avec les Anglais ayant été rompue, en 1351, Arnoul d’Andrehan fut fait prisonnier dans un sanglant combat en Saintonge. Après sa délivrance et la mort du maréchal de Beaujeu, le roi le fit maréchal de France, lieutenant-général dans les provinces situées entre la Loire et la Dordogne, et lui donna, en outre, la terre de Wassignies, près de Guise. Il le chargea d’aller défier Édouard, prince de Galles, dit le Prince noir, et ensuite d’étouffer une révolte de la ville d’Arras, où vingt révoltés des plus coupables furent décapités par ses ordres aux yeux du peuple, ce qui fit tout rentrer dans le devoir. Andrehan accompagna le roi Jean à la bataille de Poitiers, en 1356, commença l’attaque avec trois cents hommes d’armes, et, enveloppé par les archers anglais, se rendit prisonnier, et fut conduit en Angleterre. À son retour, il commanda en Languedoc, suivit Duguesclin en Espagne, au secours de Henri de Transtamare, contre Pierre le Cruel, et fut fait encore prisonnier à la bataille de Navarette, en 1367. Après avoir obtenu sa liberté, il remit sa charge de maréchal à Charles V, quand son âge ne lui permit plus d’en exercer les fonctions, et reçut, en dédommagement, celle de porte-oriflamme. « Chose non octroyée, dit Belleforest, qu’à des chevaliers vieux et expérimentés, et renommés de grand’prudhomie. » Ne pouvant supporter l’inaction, il retourna, quoique vieux et cassé, chercher en Espagne de nouveaux dangers avec Duguesclin, et y mourut de maladie, en 1370, laissant son héritage à Jean de Neuville, son neveu, maréchal de France. B-p.


ANDREI (Antoine-François), député à la convention nationale, né en Corse vers 1740, habitait à Paris depuis longtemps lorsque la révolution éclata. Il s’y occupait, pour l’Opéraa buffa et le théâtre de Monsieur, à composer des poèmes en italien et des parodies en français des opéras écrits dans la première de ces deux langues. Il adopta avec enthousiasme les principes de la révolution, et réussit à se faire nommer député de l’île de Corse à la convention nationale, au mois de septembre 1792. Il y vota, dans le procès de Louis XVI, pour la détention et pour l’appel au peuple. S’étant lié au parti de la Gironde (voy. Vergniaux, il se réunit à lui dans la journée du 31 mai 1798, et fut décrété d’accusation par suite du triomphe des montagnards. Ayant échappé par la fuite a cette proscription, il rentra dans le sein de la convention nationale après la chute de Robespierre. Il devint plus tard membre du conseil des cinq-cents, d’où il sortit en 1797 pour rentrer dans l’obscurité : il est mort vers l’année 1800. Z.


ANDREINI (François), de Pistoie, comédien célèbre, fleurit à la fin du 16e siècle. Il eut pour femme Isabelle de Padoue, comédienne comme lui, mais qui dut surtout sa célébrité à ses ouvrages. La troupe dont ils étaient chefs portait le titre de i Gelosi, (les Jaloux), et la devise de la troupe annonçait que c’était de vertu, de renommée et d’honneur que ses membres étaient jaloux : Virtu, fama ed onor ne fer gelosi. Andreini joua d’abord les rôles d’amoureux, ensuite celui de Capitan Spavento della valle inferna, rôle de charge, dont nos capitaines Tempête ne sont que le diminutif. Il s’y fit une grande réputation. Il voulut la fixer, en quelque sorte, par son ouvrage intitulé : le Bravure del Capitan Spavento, imprimé pour la première fois à Venise, en 1609, in-4o. Ce sont soixante-cinq ragionamenti, ou entretiens entre le capitaine et son valet Trappola. Andreini avait alors perdu sa femme, qu’il regrettait beaucoup. Il mit en tête de cet ouvrage bouffon, un discours sérieux, ou plutôt triste, où il exprime, à sa manière, sa tendresse pour elle et ses regrets. Il publia, depuis, d’autres dialogues en prose : Ragionamenti fantastici posti in forma di dialoghi rappresentativi, Venise, 1612, in-4o- On a aussi de lui deux pièces ou représentations théâtrales, en vers : L’Alterezza di Narciso, Venise, 1611, in-12, et l’Ingannata Proserpina, ibid., même année. Andreini avait une excellente mémoire ; aussi apprenait-il facilement les langues étrangères. Il entendait et parlait le français, l’espagnol, l’esclavon, le grec moderne, et même le turc. Il vivait encore en 1616 ; on le voit par la date de l’édition qu’il donna de quelques fragments de sa femme Isabelle. On croit qu’il mourut peu de temps après. G-é.


ANDREINI (Isabelle), l’une plus célèbres comédiennes de son temps, naquit à Padoue, en 1562. Elle épousa François Andreini, dont nous venons de parler, et prit, dans tous ses ouvrages, le titre d’Isabella Andreini, comica gelosa, academica intenta, della l’Acessa, c’est-à-dire, actrice de la troupe des Gelosi (voy. l’article précédent), membre de l’académie des Intenti, et ayant dans cette académie, le titre de l’Acessa, l’enflammée ; titres qui nous paraissent singuliers en France, mais relatifs aux usages académiques d’Italie. Isabelle montra de bonne heure les dispositions les plus rares. Elle savait à peine lire, qu’elle entreprit de composer une pièce pastorale. Elle joignit à ses études littéraires et poétiques, celle de la philosophie. Après avoir brillé sur les théâtres d’Italie, elle passa en France, où elle obtint les plus grands succès, à la ville et à la cour. Elle était belle, et possédait, dans toute sa personne, une grâce extraordinaire. Elle joignait à son talent pour le théâtre, une belle voix, l’art du chant, celui de jouer de plusieurs instruments, et de parler avec facilité l’espagnol et le français. Entourée de toutes les séductions, ses mœurs furent cependant pures et irréprochables : elle aima uniquement son mari, qui fut inconsolable de sa perte. Elle mourut à Lyon, en 1604, d’une fausse couche : on lui fit des funérailles magnifiques. Tous les poètes de son temps la pleurèrent. Ils l’avaient comblée d’éloges dès son vivant : on frappa même pour elle une médaille, avec cette légende : Æterna fama.