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lieu. Andry ne fut pas réélu doyen. La composition de quelques libelles contre Geoffroy, son successeurs, et contre la faculté, parut d’abord le venger ; elle lui valut même la censure, au prix de laquelle on crut acheter la paix ; mais son triomphe ne fut que de peu de durée ; le cardinal de Fleury connut enfin les excès dans lesquels le dépit et l’orgueil précipitaient un homme qui devait sa réputation plus à l’intrigue qu’au talent ; il cessa de l’écouter, et devint le protecteur et le vengeur de la médecine et de l’université. Andry mourut le 13 mai 1742, âgé de 84 ans, doyen d’âge des professeurs du collège royal. Voici la liste de ses nombreux écrits : 1o  Réflexions ou Remarques critiques sur l’usage présent en langue française, 1689 (le frontispice en fut changé en 1692). 2o  Traité de la génération des vers dans le corps de l’homme, ouvrage qui a été plusieurs fois réimprimé, traduit en plusieurs langues ; la 1re édition paru en 1700. Lemery en imprima une critique assez sévère dans le Journal de Trévoux, pour se venger de celle qu’Andry avait faite de son Traité des aliments ; Valisnieri l’attaqua avec moins de ménagement encore ; il valut à notre satirique l’épithète d’Homo vermiculosus, parce qu’il ne voyait partout et dans toutes les maladies que vers. Andry répondit à toutes ces censures, en publiant, sur le même sujet, en 1704, Paris, in-12, ses Éclaircissements sur le livre de la génération des vers dans le corps de l’homme, contenant des remarques nouvelles sur les vers et les maladies vermineuses. 3o  Remarques de médecine sur différents sujets, principalement sur ce qui regarde la saignée, et la purgation, Paris. 1710, in-12 ; 4o  le Régime du carême, considéré par rapport à la nature du corps et des aliments, Paris, 1710, in-12 ; Traité des aliments du Carême, Paris, 1713, 2 vol. in-12, puis 3 vol. in-12, parce qu’on y a joint l’ouvrage précédent. Dans ces trois productions, l’auteur a pour but de réfuter toutes les opinions d’Hecquet, et la discussion des faits n’est pour lui qu’un prétexte de faire la guerre ; 5o  le Thé de l’Europe, ou les Propriétés de la véronique, Paris, 1704, Reims, 1746, 1747, in-12. 6o  Examen des différents points d’anatomie, de chirurgie, de physique et de médecine, Paris, 1723, in-8o. Ici Andry fait une critique trop amère du fameux Traité sur les maladies des os, de J.-L. Petit, ouvrage qui étonna alors, et à juste titre, la chirurgie européenne, et contre lequel Andry dans son zèle amer et injuste, réunit des accusations très-souvent fausses, telles que celles qui traitaient de chimérique la rupture du tendon d’Achille. 7o  Remarques de chimie touchant la préparation de certains remèdes. Paris, 1735, in-12, écrit polémique encore, et dirigé contre la première édition de la Chimie médicale de Malouin. 8o  Cléon à Eudoxe, touchant la prééminence de la médecine sur la chirurgie, Paris, 1738, in-12, où l’auteur veut prouver, par l’ancienneté des usages et la raison elle-même, la justice de la conduite qu’il avait tenue à cet égard pendant son décanat. 9o  Orthopédie, ou l’Art de prévenir et de corriger dans les enfants, les difformités du corps, Paris I741, 2 vol. in-12, fig. ; Bruxelles, 1743, 1 vol. in-8o, fig. Andry est encore auteur de quelques thèses. Il a fourni des articles de médecine au Journal des Savants, depuis 1702 jusqu’en 1759. Dionis, son gendre, a publié de lui un Traité sur la Peste, qu’il avait dicté en français, au collège royal, par ordre du régent. Du reste, le caractère de tous ces écrits confirme le jugement que nous avons porté sur Andry ; aucune de ces grandes vues spéculatives et pratiques qui rappellent la médecine antique d’Hippocrate, l’observation de la nature, et la connaissance de ses lois ; tout y est sacrifié à cet esprit de satire qui seul a semblé exciter l’auteur à prendre la plume ; aussi, de nos jour, où l’intérêt des controverses locales est évanoui, ces productions sont-elles oubliées, et n’ornent-elles plus que la bibliothèque de nos plus infatigables érudits. C. et A-n.


ANDRY (Charles-Louis-François), docteur régent de la faculté de Paris, naquit dans cette ville en 1741. Fils d’un épicier-droguiste qui lui laissa 6,000 livres de rente, il était maître de choisir son état ; ce fut par le désir d’être utile à ses semblables qu’il se décida pour la médecine. Ses cours terminés, il reçut ses grades avec beaucoup de distinction, et partagea dès lors son temps entre l’étude et l’exercice de sa profession. Les qualités d’Andry lui méritèrent bientôt l’estime de ses confrères et l’amitié des savants, entre autres du docteur Sanchès, qui lui légua tous ses manuscrits, et dont il a publié, sous le titre de Précis historique, un intéressant éloge. (Voy. Sanchès.). Médecin en chef des hôpitaux de Paris, Andry fut un des premiers membres de la société royale de médecine. Il eut l’honneur de la présider plusieurs fois, et lui communiqua diverses observations très-importantes. Aussi généreux que modeste, il poussait le désintéressement jusqu’à l’excès. Parmi les malades qui réclamaient ses soins, il donnait toujours la préférence aux plus pauvres ; à ceux qui, loin de pouvoir lui payer le prix de la visite, avaient au contraire besoin qu’il leur laissât de l’argent pour exécuter ses ordonnances. Dans sa naïve bonhomie, il se rendait le témoignage que l’intérêt ne l’avait jamais guidé, par ce mot charmant et pittoresque : « Je puis dire que j’ai gentilhommisé la médecine. » Outre les nombreuses charités qu’il faisait lui-même, il donnait chaque année aux pauvres le dixième de ses revenus. Corvisart, son ami, l’ayant fait nommer a son insu l’un des quatre médecins consultants de l’empereur, Andry préleva sur le traitement de cette place les frais de costume qu’il avait été obligé de faire, et remit constamment le surplus au maire de son quartier pour le distribuer aux indigents, persuadé, disait-il, qu’il ne devait pas profiter d’un argent qu’il reconnaissait n’avoir pas gagné. Après la restauration, un ministre, ami d’Andry, lui conseilla de demander une pension pour ses anciens services. — « Comment me la paiera-t-on ? — Sur la caisse des hôpitaux. — Et c’est moi, lui dit Andry en colère, qui prendrais l’argent des pauvres ! Tu peux bien la garder ta pension ; je n’en veux pas. » Andry cependant était loin d’être riche. Sur la fin de sa vie il fut