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résolu de les faire périr, assembla ses ulémas (docteur) pour prendre leurs avis. Tous souscrivirent à sa volonté, à l’exception d’Abou-Hanyféh. « N’est-il pas évident, dit-il, que cet engagement est inadmissible ; car les hommes ont-ils le droit et de disposer d’une existence qui n’appartient qu’au maître de l’univers ? » Abdallah II, irrité de sa courageuse résistance, le fit jeter dans les prisons de Bagdad et empoisonner peu de temps après l’an 150 de l’hégire (767 de J.-C.). Son principal ouvrage est intitulé Mesned ou appui. Il y établit tous les points de l’islamisme sur l’autorité du Coran et de la tradition. Un homme brutal lui ayant donné un soufflet, ce Socrate musulman se contenta de dire : « Vindicatif, je vous rendrais outrage pour outrage ; délateur, je vous accuserais devant le calife ; mais j’aime mieux demander à Dieu qu’au jour du jugement il me fasse entrer au ciel avec vous. » Trois cents ans après sa mort, on lui éleva un mausolée, et l’on fonda un collège pour ses disciples. J-n.


ABOUL-CACEM, nommé par quelques historiens grecs Apelchasem, s’empara de Nicée après la bataille où périt Soléiman Ier, sultan seldjouci de d’Iconium, et, dirigeant ensuite ses efforts contre les Grecs, pénétra jusqu’à la Propontide. Alexis Comnène, qui occupait alors le trône de Constantinople, après lui avoir offert inutilement la paix, envoya contre lui Taticius, qui vint l’assiéger dans Nicée. L’arrivée d’Acsancar-Borsky, l’un des émirs de Mélik-Schah (voy. ce nom), avec une armée de 50,000 hommes, força le général grec à la retraite, ce qui ne l’empêcha pas ensuite de battre Aboul-Cacem, sorti de la ville pour le harceler. Aboul-Cacem ne se laissa point abattre par cette défaite, et peu après il s’empara de Chio, qui devint son arsenal maritime. Cette action hardie porta l’épouvante jusqu’à Constantinople. Alexis donna alors le commandement de sa flotte à Manuel Butumite, et à Taticius celui de l’armée de terre. L’armée d’Aboul-Cacem était composée, pour la majeure partie ; de cavalerie qui, par le peu d’espace qu’il occupait, lui devenait inutile. Pour remédier à cet inconvénient, il s’écarta de sa flotte, ne laissant qu’un très-petit nombre de soldats pour la garder, et vint camper à Alicas. Ce mouvement irréfléchi causa la perte de sa flotte, qui fut attaquée et incendiée par Manuel ; et ce revers fut suivi bientôt après de la déroute de son armée de terre, attaquée par Taticius. Il semblait qu’après cette double victoire l’armée grecque dut s’emparer de Nicée, ou Aboul-Cacem s’était réfugié. Alexis, joignant la ruse à la force, lui fit offrir la paix, et le détermina à venir à Constantinople, ou il le plongea dans toutes sortes de délices, tandis qu’une flotte, commandée par Eusthate, s’emparait de Nicomèdie, et qu’on y construisait une forteresse au nom et à l’insu d’Aboul-Cacem. Pendant ce temps Acsancar, général de Mélik-Schah, s’avançait à grandes journées sur Nicée, et était pour Aboul-Cacem un ennemi non moins dangereux qu’Alexis. Il fallait cependant ou se livrer entièrement à celui-ci, ou se soumettre à Mélik-Schah. Aboul-Cacem choisit le premier parti, et implora le

secours de l’empereur. Alexis lui envoya le général Taticius, qui arbora le drapeau impérial sur les murs de Nicée. Acsancar crut avoir affaire à Alexis Commène lui-même, et se retira ; mais Mélik-Schah, persistant dans sa haine contre Aboul-Cacem, envoya contre lui une nouvelle armée, sous la conduite de Bouzan ; et tandis qu’il négociait la paix avec Alexis, il offrait de lui rendre les pays conquis par Aboul-Cacem, et demandait sa fille en mariage pour son fils aîné. Alexis, qui ne voulait ni donner sa fille à un musulman, ni favoriser l’établissement d’un voisin aussi dangereux, lui envoya un ambassadeur pour l’amuser par de vaines promesses, et donna secrètement des secours à Abou-Cacem, qui força Bouazn à lever le siége de Nicée. Mais ces secours, suffisants pour arrêter les progrès de Mélik-Schah, ne l’étaient pas pour le vaincre. Abou-Cacem, lassé d’être le jouet d’Alexis, résolut d’aller se justifier auprès de Mélik-Schah. Il partit pour Ispahan avec des présents considérables, qui ne purent apaiser son ennemi. À son retour, il fut atteint par trois cents cavaliers, qui l’étranglèrent. Sa mort et celle de Mélik-Schah, arrivée peu de temps après, rendirent la liberté et le trône à Kilidj-Arslan, fils de Soléiman. Ce prince était renommé par ses grandes richesses ; et l’on dit encore aujourd’hui les trésors d’Aboul-Cacem. J-n.


ABOUL-FARADJ-ALI, célèbre auteur arabe, issu de Merwan, dernier calife des Ommiades, naquit à Ispahan, l’an 284 de l’hégire (897 de J.-C.), et fut élevé à Bagdad. Doué d’une mémoire prodigieuse} il embrassa toutes les connaissances alors cultivées. La jurisprudence, la médecine, et surtout la poésie et l’histoire, furent l’objet de ses études. Le Kitab Aghany, ou Recueil des anciennes chansons arabes, où il a déposé le fruit de ses travaux, est un monument précieux pour l’histoire de la littérature arabe Le prince Séif-ed-Daulah, auquel il le présenta, le récompensa généreusement, et son docte vizir, Sahebehn-Abad, en faisait un tel cas, qu’il le portait dans tous ses voyages ; parce que ce livre lui tenait lieu, disait-il, de tous ceux qu’auraient portées vingt chameaux. La bibliothèque royale possède un exemplaire de ce précieux ouvrage, en 4 vol. in-fol, rapporté d’Égypte, et qu’on a lieu de soupçonner incomplet. Aboul-Faradj en avait composé plusieurs autres sur les généalogies. Ibn-Khalécan nous en a conservé la nomenclature. Il mourut à Bagdad, le 14 de dzoui-hédjah ; 356 de l’hégire (20 novembre 967). J-n.


ABOUL-FAZL (Le cheik Alamy), le plus élégant écrivain de l’Inde, suivant Ferichtah, remplit à la fois les fonctions de premier vizir et d’historiographe du Grand Mogol Akbar. La vie politique de ce ministre nous est peu connue ; mais nous savons qu’il eut le talent de plaire infiniment à son maître, et qu’il jouit même d’une faveur capable d’exciter la jalousie de l’héritier présomptif de la couronne, Sélym, nommé ensuite Djihanguyr. Da malveillants avaient trouvé le moyen de semer la division entre le monarque et son fils. Ce fut à cette époque qu’Aboul-Fazl fut appelé du Dékehan où il se trouvait, pour