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française étant entrée en Savoie, il ne se crut pas en sùreté dans son voisinage et passa à Soleure, d’où il se rendit à Erlang en Franconie. En 179«l, il était à Bruxelles depuis peu de temps, lorsqu’il lui fallut encore fuir devant les armées françaises. L’année suivante, il fut aussi forcé de quitter Dusseldorf parle même motif ; ce qui était d’autant plus facheux qu’il se trouvait à peu près dépourvu de ressources, et qu’il eût été exposé bientôt aux plus rigoureuses privations, si quelques pretres de son diocèse, réfugiés en Angleterre, n’eussent ouvert entre eux une souscription dont ils lui firent parvenir le montant. Après avoir quitté Munster pour Brunswick, l’évêque de Lisieux fit réimprimer dans cette dernière ville, et sous la direction de l’abbé Duvoisin (depuis évêque de Nantes), la Religion vengée. poëme du cardinal de Bernis ; et il consacra le bénéfice de cette réimpression au soulagement de ses compagnons d’infortune. Le duc de Brunswick ayant alors éloigné de ses États les émigrés qui s’y étaient réfugiés, La Ferronnays partit pour Constance, où il se réunit à quinze évêques français, parmi lesquels se trouvait l’archevêque de Paris (Juigné). Les troupes de la république ayant pénétré en Suisse, il fut contraint de fuir de nouveau. Plus accablé par les chagrins que par Page, il alla mourir à Munich le 15 mai 1799. I)—u—s.


FEBRONNAYS (PIERRE-LOUIS-ÀUCUSTIÈ Fennos, comte ne LA), diplomate et homme d’État, était de la même famille que le précédent. Dans La Chesnaye des Bois et le Nobílíaire de Bretagne, on trouve la mention d’un Payen Feron, qui était à la croisade de 1248 : son nom et ses armes figurent à Versailles dans la salle des Croisades ; cet écusson est encore celui des La Ferronnays ; mais ils font remonter leur origine à des temps plus reculés. Jeune encore, le comte de La Ferronnays suivit en émigration son père, , lieutenant général des armées du roi, et rejoignit avec lui les princes à l’armée de Condé. Sa mère était restée en France, et mourut dans les prisons de Nantes. L’une de ses sœurs, femme ¢l’un esprit distingué, est morte supérieure des Dames de la Visitation dans la même ville. Après avoir servi dans le corps de Condé jusqu’au moment où il fut licencié, le comte de La Ferronnays allait accepter le commandement d’un régiment destiné pour l’Égypte ; mais le duc de Berri, qui l’avait déjà distingué et pris en affection, se l’attacha comme aide de camp, et dès lors il partagea avec ce prince infortuné, jusqu’à sa mort tragique, sa bonne et sa mauvaise fortune. Il ne rentra en France qu’en 1811 avec la maison de Bourbon. Louis XVIII le nomma maréchal de camp, le «1 juin de la même année, et l’éleva à la pairie le 17 août 1815. Il fut un des membres de la commission chargée de juger le général Bonnaire (voy. ce nom). En 1817, il fut nommé ambassadeur ordinaire et plénipotentiaire en Danemarck. Il quitta ce poste pour passer comme envoyé extraordinaire à la cour de St-Pétersbourg. I

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Il sut s’attirer dans cette mission la confiance de l’empereur Alexandre Ier, et le suivit au congrès de Troppau en octobre 1820.11 assista également, en 1821, aux réunions de Vienne et au congrès de Leybach, et à la même époque fut chargé d’aller féliciter le roi de Sardaigne Charles-Félix sur son avènement. La mission du comte de La Ferronnays à St-Pétersbourg fut remarquable par des négociations restées dans un demi-jour et qui avaient pour objet de résoudre la question d’orient. Après la campagne des Balkans, qui se termina par le traité d’Andrinople, l’empire turc semblait toucher à sa ruine. Il n’avait plus ni armée, ni marine, ni finances ; l’indépendance de la Grèce l’avait déjà affaihli de la perte d’une de ses riches provinces, et le désastreux traité d’Andrinople lui enlevait ses plus belles positions devant le Danube. l’empereur Nicolas pensait dès lors à réaliser les projets qui viennent d’allumer dans le monde une guerre si terrible. On a raconté que la question d’orient aurait été à cette époque débattue entre la maison de Bourbon et le chef de la famille llomanow ; qu’une alliance aurait été conclue entre la France et la Russie, et qu’à cet arrangement la France devait gagner la frontière du Rhin. Le comte de La Ferronnays aurait été, sinon le négociateur définitif, au moins le préparateur le plus actif de cette alliance, dont au reste lc prince de Polignac ne craignait point de révéler le secret pendant sa captivité au château de Vincennes en 1850. En 1828, le roi Charles X rappela de St-Pétersbourg son ambassadeur, pour lui confier le portefeuille des affaires étrangères dans le ministère Martignac. Il s’y distingua par son application aux affaires, la loyauté et la modération de son caractère. Tous les partis lui rendirent cette justice, et il sortit du pouvoir par l’avènement du cabinet du prince de Polignac. Il était du nombre de ces conseillers sages et prudents qui, s’ils eussent été écoutés, auraient préservé la branche ainée des malheurs qui allaient l’assaillir. Ne voulant pas se priver de son dévouement et de ses services, le roi Charles X le désigna pour remplacer bl. de Chateaubriand à l’ambassade de Rome. Il s’y concilia la confiance et la considération du sacré collége, et les artistes ne s’aperçurent point qu’ils eussent perdu au départ de son illustre prédécesseur. La révolution de 1850 ne Ilt que réaliser ses prévisions ; néanmoins, à l’inauguration de la branche cadette il résigna toutes ses charges et fonctions, et rentra dans la vie privée. Sa fortune était médiocre, et il était loin de l’avoir augmentée dans les positions éminentes qu’il avait occupées. Il résista cependant aux vives instances qui lui étaient faites et qui lui ouvraient les plus brillantes perspectives s’il eût consenti à se rallier au gouvernement nouveau. Il pensait, comme Chateaubriand, que la dignité de la vie n’existait pas sans l’unité du caractère politique. Il quitta sa retraite en 1840, appelé en Italie par le comte de Chambord, qui voulait s’éclairer des