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AOU

Sparte, avait agi directement contre l’intérêt du peuple, et Critias, le plus cruel des trente tyrans, avaient été les disciples du philosophe. On sait quelle fut l’issue de cette accusation. Anytus et ceux qui s’étaient joints à lui ne tardèrent pas à être punis de leur conduite par la haine publique, car personne ne voulut communiquer avec eux : on faisait changer l’eau des bains dans lesquels ils s’étaient lavés, et on leur refusait du feu lorsqu’ils en demandaient. Le peuple reconnut bientôt l’iniquité du jugement qui avait frappé Socrate, et Anytus fut exilé ; il se retira à Héraclée, vers le Pont-Euxin, où il fut, a ce qu’on dit, assommé à coups de pierres par les gens du pays. Le savant Fréret, dans une dissertation qui se trouve dans le 47e volume des Mémoires de l’académie des inscriptions, semble douter de l’exil d’Anytus et de ce qu’on raconte au sujet de sa mort ; je partage son opinion, mais ce n’est pas ici le lieu de déduire les raisons sur lesquelles je me fonde. C-r.


AOD, fils de Géra, de la tribu de Benjamin, fut élu juge d’Israël après Othoniel, vers l’an 1443 avant J.-C. Ayant été choisi pour porter à Églon, roi de Moab, le tribut annuel que les israélites lui payaient depuis dix-huit ans, il conçut le dessein de profiter de cette occasion pour délivrer son pays de l’oppression sous laquelle il gémissait. Après qu’il eut remis le tribut, il feignit d’avoir à communiquer au roi un secret important : Églon fit retirer tous ceux qui étaient dans son appartement, et, des qu’ils furent seuls, Aod lui enfonça un poignard dans le sein, et se retira aussitôt en fermant la porte sur lui. Les gardes crurent que leur maître voulait reposer ; et, lorsqu’après avoir attendu quelque temps, ils entrèrent dans l’appartement, ils le trouvèrent étendu mort. Aod avait eu le temps, pendant le premier trouble qu’excita cet événement, de gagner les frontières d’Israël. Du haut de la montagne d’Ephraïm il sonna de la trompette, rassembla autour de lui une nombreuse troupe à laquelle il fit part de ce qui s’était passé, s’empara de tous les gués par lesquels les Moabites auraient pu s’échapper, fondit sur eux avec son armée, de sorte qu’il en périt 10,000 dans cette journée, qui procura une paix de quatre-vingt-dix ans à la terre de Chanaan. T-d.


AOUST (le marquis Jean-Marie d’), né dans la Flandre française vers 1740, de l’une des premières familles de la province, entra au service de bonne heure ; mais n’ayant pas obtenu l’avancement qu’il désirait, il se retira mécontent, et vécut dans ses terres jusqu’à l’époque de la révolution, dont il embrassa la cause avec beaucoup de chaleur. Nommé, en 1789, député de la noblesse du bailliage de Douai aux états généraux, il se plaça, dès les premières séances, dans la minorité de son ordre qui se réunit au tiers état ; et, du reste, il fut peu remarqué dans cette assemblée, où il vota toujours avec la majorité et pour les mesures extrêmes, et ne prit pas la parole une seule fois. Nommé député à la convention nationale par le département du Nord, en Septembre 1792, il dénonça, dans la séance du 30 de ce mois, toute la municipalité de St-Amand, ainsi que celle d’Orchies, qui, dit-il, avaient accueilli les Autrichiens par des illuminations et des réjouissances ; et il proposa d’envoyer des commissaires sur cette frontière pour y surveiller les ennemis de la république, et diriger la défense de Lille, qui était assiégée par l’armée autrichienne. D’Aoust fut lui-même nommé un de ces commissaires, et on lut dans la séance du 7 octobre un rapport de leurs opérations, conforme en tous points, pour le fond et pour la forme, à toutes les pièces, à tous les discours de cette époque d’exaltation et de délire. Revenu au sein de la convention nationale, d’Aoust y vota en ces termes dans le procçs de Louis XVI : « La mort de Louis ou de la république. Louis a trop vécu ; sa mort est une justice. » Il vota aussi contre l’appel au peuple et contre le sursis à l’exécution, et ne cessa point de se ranger du parti le plus exalté, ce qui ne l’empêcha pas d’être exclu comme noble de la société des jacobins de Paris, et de voir périr son fils aîné sur l’échafaud comme traître à la patrie, sans pouvoir le secourir. (Voy. l’article suivant.) Lorsque la session conventionnelle fut terminée, en 1795, d’Aoust fut nommé commissaire du directoire exécutif dans son département, et, après le 18 brumaire, le consul Bonaparte le fit maire de Quincy, où se trouvaient ses propriétés. Il est mort dans ce village, vers 1812. M-d j.


AOUST (Eustache d’), fils aîné du précédent, naquit à Douai en 1763, et fut, avant la révolution, lieutenant au régiment du roi infanterie. Nommé, en 1790, aide de camp de Rochambeau, il fit avec ce maréchal la première campagne de la révolution sur la frontière du Nord, en 1792. Devenu général de brigade en 1793, il passa à l’armée des Pyrénées-Orientales, où il obtint bientôt le grade et les fonctions de général de division. Il commanda même temporairement cette armée après la destitution de Puget-Barbantane, et dirigea l’attaque du camp retranché des Espagnols à Peyres-Tortes, qui fut emporté le 17 septembre 1793, et où les Français s’emparèrent de quarante-six bouches à feu et de cinq cents prisonniers, et délivrèrent Perpignan. Il y avait alors à l’armée des Pyrénées-Orientales un principe de désorganisation. Deux députés conventionnels, Fabre de l’Hérault et Cassanyès, y dirigeaient les opérations ; et Dagobert commandait, dans les deux Cerdagnes, un corps indépendant. Blessés a l’affaire de Peyres-Tortes, ils donnèrent le commandement de l’armée à Dagobert, qui échoua le 22, à l’attaque du camp de Trouilles, par suite de la jalousie et du mécontentement des autres généraux. Dagobert ayant été rappelé à Paris, l’armée aux ordres de d’Aoust avait repris plusieurs places sur les Espagnols, les avait rejetés au delà de la rivière de Tech, et repoussés sur le Boulou, après avoir enlevé leur camp d’Argelès. Lorsqu’elle passa, au commencement d’octobre, sous le commandement de Turreau, ce général attaqua le 14 les Espagnols dans leur forte position du Boulou. Cette affaire sanglante ne réussit point, parce que le conventionnel Fabre avait affaibli l’armée pour préparer une invasion en Catalogne. Turreau, voyant l’état de