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de cette horrible scène, et, par la seule énergie de ses paroles, dissipe la multitude. La ville de Bologne, en reconnaissance de cet éminent service, le força d’accepter un chef-d’œuvre du Guide, la Madeleine repentante. Bientôt après il dirigea les mouvements insurrectionnels de la Toscane et contraignit la garnison de Florence à capituler ; elle se composait de 2,000 hommes ; il fut convenu qu’elle s’embarquerait sur trois frégates françaises qui recevraient également à leur bord la garnison de Livourne, et les conduiraient toutes deux à Gènes, où Masséna était bloqué par l’armée autrichienne. D’Asper, sur-le-champ, part à franc étrier pour s’assurer par lui-même de ce qui se passait à Livourne ; les Français venaient de l’évacuer ; il voit flotter sur les tours de cette ville le drapeau autrichien ; il assemble les autorités, fait replacer les couleurs françaises, et range, des deux côtés du port, six canons, les seuls qu’il y eût. Un faux message achève d’induire en erreur le commandant de la petite flotte, qui, sans défiance, entre dans le port. D’Asper se présente en grand uniforme sur la rive ; les cris à fond de cale ! se font entendre de toutes parts ; nul moyen de faire résistance. Les trois frégates et tout ce qui s’y trouvait tombent au pouvoir de l’aventureux général. Le collier de commandeur de Marie-Thérèse devint le prix de cette ruse de guerre. Le siége de Gènes fut moins favorable à d’Asper. Dans le mois d’avril 1800, les Français ayant attaqué la Bochetta, il défendit avec un rare courage ce poste important contre des troupes sans cesse renouvelées ; mais, entouré par des forces supérieures, il fut contraint, sur le Monte-Fascio, de déposer les armes, après avoir vu tomber autour de lui la plus grande partie des siens. Revenu de sa captivité après la suspension d’armes de Marengo, il combattit avec succès les avant-postes français entre la Chiesa et le Mincio. Attaqué ensuite dans la position de San-Lorenzo, il réussit à s’y maintenir. Le comte de Bellegarde ayant donné l’ordre au général Vogelsang de s’emparer le 27 de Ceresara, le général d’Asper fut chargé de diriger l’attaque, et il enleva à la baïonnette le village, qui était occupé par huit cents hommes. La paix de Lunéville suspendit ses travaux guerriers et lui permit de revoir sa patrie et sa famille ; il fit aussi dans ce temps-la quelque séjour à Paris, où le premier consul l’accueillit avec une grande distinction. La guerre s’étant rallumée en 1805, d’Asper fut chargé de couvrir la marche du général Mack. Longeant la rive droite du Danube, il passa ce fleuve à Wertingen, et se jeta sur les derrières de l’armée française, dont le mouvement fut arrêté par cette manœuvre hardie. Après l’avoir harcelée avec 2,200 hommes dispersés en tirailleurs, il rallia sa troupe et voulut reprendre le chemin de Wertingen ; mais un épais brouillard l’empêche de se reconnaître ; il tombe dans une embuscade, essuie un feu violent ; son cheval s’abat, les dragons le désarment, et le général Savary, qui se trouvait à deux pas, vint recevoir le prisonnier ; puis, se plaçant avec lui dans une calèche, il l’emmène au quartier général de l’empereur Napoléon. Pendant la route, Savary ne cessait de multiplier ses questions ; elles devinrent tellement indiscrètes que d’Asper lui dit avec dignité : « Général, épargnez-vous la peine de me questionner davantage ; si l’on m’avait laissé mon épée, vous n’oseriez pas me faire un pareil affront. » La ville d’Auxerre lui fut désignée pour prison. La paix qui suivit la bataille d’Austerlitz le rendit à la liberté. Il donna quelques jours à sa chère Belgique, et, de retour à Vienne, y reçut la main de la princesse Jabloneska, veuve du palatin de Cracovie, et, peu de temps après, la clef de chambellan. L’empereur d’Autriche lui permit alors de quitter le service, avec le grade de lieutenant général, mais sous la condition expresse de reprendre de l’activité si les circonstances l’exigeaient. Elles ne se firent pas longtemps attendre. En 1809, les hostilités recommencèrent ; d’Asper eut le commandement de 16,000 grenadiers. Sa conduite à la bataille d’Essling fut admirable ; elle lui mérita le grade de feldzeugmester (général d’infanterie), et le titre de colonel-propriétaire du régiment de Stuart, qui prit alors le nom d’Asper. Dirigeant l’aile gauche de l’armée autrichienne à Wagram, il parvint à s’emparer du village d’Aderklaw entouré de retranchements formidables ; puis, enfonçant l’aile droite des Français, il allait peut-être décider la victoire en faveur des Autrichiens, lorsqu’un boulet le renversa de son cheval. Une partie du ventre emportée et le bras droit fracassé, il eut le courage de se faire remettre en selle. Toutefois ses forces l’abandonnèrent et il tomba sans connaissance. On lui fit l’amputation du bras dans un château, à deux lieues du champ de bataille. Il subit cette cruelle opération sans proférer une plainte ; mais lorsqu’on voulut replacer ce qui lui restait d’entrailles, il expira. Un fils naturel qu’il avait fait légitimer, et qui, décoré déjà de la croix des braves, marchait sur ses traces, reçut son dernier soupir. Il fut enterré à Brunn. Un des traits caractéristiques du baron d’Asper était l’humanité pour les soldats et pour les prisonniers ; il mettait aussi tous ses soins à rendre moins pénibles aux habitants les charges de la guerre. Doué d’un esprit vif, ses reparties étaient toujours promptes et piquantes. Il n’a point laissé de mémoires sur ses campagnes ; mais une correspondance suivie avec sa famille, et particulièrement avec son frère, M. van Hoobrouck de Mooreghem, aujourd’hui sénateur belge, pourrait y suppléer ; elle fournirait les matériaux de plusieurs volumes intéressants. — Un autre frère, van Hoobrouek de Tevalle, colonel d’un régiment de hussards, est mort à Liége en 1802. Il était également cité comme un des plus braves officiers de l’armée autrichienne. St-t.


ASPETTI (Tiziano), l’un des plus grands sculpteurs dont s’honore l’Italie, naquit à Padoue en 1565. Quelques biographes ont avancé que cet artiste descendait d’une ancienne et illustre famille ; mais il n’en existe aucune de ce nom qui soit inscrite au registre des patriciens padouans. D’autres ont prétendu qu’il était neveu du Titien ; mais il est impossible que ce peintre célèbre, né, comme l’on sait, en 1477, eût, a l’époque de la naissance d’Aspetti, une sœur en état d’avoir des enfants. On peut pré-