siège. Les chevaliers maures, par un esprit de galanterie qui donne une idée des mœurs de ce temps-là, ordonnèrent la retraite, et l’armée musulmane défila devant la reine, en célébrant ses vertus et sa beauté. Les Castillans ayant ensuite décapité, par représailles, deux généraux mahométans, et placé leurs têtes sur le sommet du palais des rois à Tolède, la reine ne put souffrir ces odieux trophées ; après les avoir fait enlever et déposer sur deux chars funèbres, elle les lit porter aux veuves des deux généraux maures. Cette princesse, aimée de ses sujets, estimée des ennemis même, ne fut pas toujours heureuse : elle eut la douleur de se voir préférer longtemps une indigne rivale, nommée Gontrade. Elle mourut le 5 février 1 119, laissant deux fils, Sanche et Ferdinand, et une fille qui épousa le
roi de Navarre.
BÉRENGÈRE, fille ainée d’Alphonse III, roi
de Castille, épousa, en 1201, Alphonse IX, roi de
Léon. Répudiée en 1209, par les instigations du pape
Innocent III, sous prétexte de parenté avec son
époux, elle revint en Castille, dont elle fut déclarée
régente en 121-1, pendant la minorité de son frère
Henri Ier. L’ambition des chefs de la maison de Lara
ne leur permit pas de voir sans peine le pouvoir et
la personne du roi entre les mains d’une femme ; et
ils intriguèrent pour lui ôter l’un et l’autre. Cette
vertueuse princesse, qui ne désirait que la retraite,
quoiqu’elle ne manquât ni de fermeté ni de talents
pour gouverner, convoqua les états à Burgos, et,
moins par faiblesse que par amour du bien public,
elle abdiqua la régence en faveur du comte Alvar
de Lara. Bientôt la tyrannie du nouveau régent lit
regretter l’administration de la reine ; la plupart des
grands l’engagèrent à reprendre la régence ; mais
la crainte de causer une guerre civile arrêta Bérengère.
Elle se contenta de rappeler à don Alvar qu’il
avait juré solennellement de gouverner le royaume
avec justice. Cet avis aigrit le régent ; il osa accuser
la reine d’avoir voulu empoisonner le roi son frère,
confisqua ses biens, et la bannit du royaume. Quoique
cette révoltante calomnie n’eut persuadé personne,
Bérengère céda à l’orage, et se retira en
1217, au château d’Otella, place très-forte près de
Palencia. Un grand nombre de seigneurs la suivirent,
et se déclarèrent ses chevaliers ; elle y fut
jointe également par don Lopez de Haro, seigneur
castillan, qui, à la tête de ses vassaux, venait se
ranger du parti de la reine ; mais le régent avait
pour lui la présence et le nom du roi. Bérengère
allait être assiégée dans son château, lorsqu’un événement
imprévu vint la soustraire aux dangers qui
la menaçaient pour la replacer sur le trône : ce fut
la mort du jeune Henri, arrivée à Palencia, par la
chute d’une tuile qui lui fracassa la tête. Bérengère,
devenue reine sans contradiction, abdiqua sur-le-champ
la couronne en faveur de son fils ainé Ferdinand,
issu de son mariage avec le roi de Léon. Elle
jouit à la cour de ce prince de toute la considération
que lui méritait sa vertu, eut toujours la régence du
royaume pendant les expéditions du jeune roi, et fut
à la Castille ce que sa sœur Blanche était en France.
(Voy. Blanche.) Cette princesse mourut en 1211,
vivement regrettée.
— BÉRÉNICE, petite-fille de Cassandre, frère d’Antipater, par Antigone sa mère, épousa en premières noces Philippe Macédonien, qui était sans doute l’un des officiers d’Alexandre, et en eut plusieurs enfants, entre autres Magas, roi de Cyréne, et Antigone, qu’elle maria à Pyrrhus, roi d’Épire. Elle suivit en Égypte Eurydice, fille d’Antipater, qui allait rejoindre Ptolémée, son époux, et elle sut inspirer une telle passion à ce prince, que, quoiqu’il eût des enfants d’Eurydice, il abandonna pour épouser Bérénice. Il lui érigea un temple de son vivant, la fit représenter sur ses médailles, et plaça sur le trône Ptolémée, son fils, au préjudice de ses
autres enfants.
BERENICE II était fille de Ptolémée Philadelphe
et d’Arsinoé, fille de Lysimaque ; elle suivit, à
ce qu’il parait, sa mére dans son exil, et se retira
avec elle auprès de Mages, roi de Cyrène, qui
épousa Arsinoé, et adopta Bérénice ; ce qui explique
comment Polybe et Justin disent qu’elle était fille
de Mages, tandis que, suivant Callimaque, qui vivait
à sa cour, elle était fille de Ptolémée Philadelphe
et d’Arsinoé. Magas ayant fait la paix avec Ptolémée
Philadelphe, on convint, pour la cimenter,
d’un mariage entre Bérénice et Ptolémée, son frère
de père et de mère, mais qui avait été adopté par
Arsinoé, sœur et seconde épouse de son père. Magas
étant mort sur ces entrefaites, Arsinoé, sa veuve,
rompit ce mariage, qui lui déplaisait, et fit venir, de
la Macédoine, Démétrius, fils de Démétrius Poliorcètes,
pour lui faire épouser sa fille. Ce jeune
homme étant arrivé, elle le prit elle-même pour
amant, et, comme il se conduisait avec beaucoup
d’insolence, il se forma contre lui une conspiration
à la tête de laquelle était Bérénice, qui le lit tuer
dans le lit même de sa mère, en recommandant
qu’on ne fit aucun mal à celle-ci. C’est sans doute
à cette action que Callimaque faisait allusion dans le
vers ainsi traduit par Catulle :
Cognoram a parva virgine maguanimam.
Elle épousa ensuite Ptolémée Évergète, son frère. Elle était à peine mariée, que Ptolémée fut obligé de partir pour une expédition dans l’Assyrie ; elle fit vœu de couper sa chevelure, et de la consacrer à Vénus, s’il revenait victorieux ; et, à son retour, elle la déposa effectivement dans le temple de Vénus Arsinoé Zéphyritis. Ptolémée paraissant fåché qu’elle se fût privée d’un si bel ornement, Cenon de Samos, célèbre astronome, annonça à Ptolémée qu’il avait découvert au ciel une nouvelle constellation, qui était la chevelure de Bérénice que les dieux avaient enlevée, et Callimaque lit, a ce sujet, un charmant petit poëme, que nous avons perdu, mais dont il nous reste la traduction latine par Catulle. Bérénice fut tuée par les ordres de Ptolémée Philopator,
son fils, l’an 216 avant J.-C.
BERENICE III était aussi fille de Ptolémée Philadelphe, qui, pour sceller la paix qu’il venait de conclure avec Antiochus Théos, la lui donna en