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Page:Michaud - Biographie universelle ancienne et moderne - 1843 - Tome 30.djvu/234

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traîna sa nouvelle doctrine, Nassir alla de Nisapour à Balkh, et de là dans le Kohistan. Il termina sa vie dans la province de Badakchan. Les habitants de ce pays, ainsi que ceux du Kohistan, regardent Nassir comme un saint, tandis qu’il est traité d’hérétique et de mécréant dans toutes les autres contrées de la Perse. Nassir-Khosrou a laissé un Recueil de poésies, ou Divan, qui compte près de trente mille vers et appartient au genre didactique ; - le Rouchenayi-Nameh, ou Livre des enseignements, en vers ; - le Dourri nasmik ensol hakaïk . ou Enfilade des perles du trésor de la vérité, ouvrage philosophique, également en vers, qui a été cité avec éloge par le poète Djami dans son Soubdet-ol-hakaïk, où il s’en trouve aussi des extraits. Nassir a écrit en outre, en prose, le Sefer Nameh, ou Livre des voyages, qui tient lieu d’autobiographie, et enfin dix livres de traités philosophiques. Aucun de ses ouvrages n’a encore été imprimé.

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NASSIR-EDDYN (Abou-Djafar Mohammed-Ben-Haçan), célèbre astronome persan, cité quelquefois par les Orientaux sous le simple nom de Khodjah (docteur), naquit l’an 597 de l’hégire (1201) à Thous, dans le Khoraçan, ce qui le fait assez fréquemment désigner par le surnom d’Al Thoussy. On ne sait rien sur les premières années de sa vie, qu’il employa sans doute à voyager et à étudier les auteurs grecs. Étant venu habiter le Couhestan, il trouva un Mécène dans le gouverneur de cette province, auquel il dédia un traité de morale, intitulé Akhlak al Nassiry, dans lequel il a rassemblé tout ce qu’Aristote et Platon ont écrit sur la sagesse[1]. Il adressa aussi une ode à Mostasem, calife de Bagdad, mais comme il avait oublié de mettre la suscription, Au calife de la surface de la terre, son protecteur le fit incarcérer pour faire sa cour à l’orgueilleux Mostasem, et l’envoya comme otage, dans le château d’Alamout, auprès d’Ala- eddyn - Mohammed, prince des Ismaéliens ou Assassins. Nassir-eddyn y demeura jusqu’à l’époque où Rokn-eddyn-Khour-Shah, fils et successeur d’Ala-eddyn, fut obligé de céder à la puissance des Moghols, l’an 654 (1256). Rokn-eddyn, avant de rendre ses châteaux et sa personne à Houlagou, lui envoya Nassir-eddyn, qui annonça au conquérant que la chute des Ismaéliens était écrite dans les astres. Flatté de cette prédiction, qui se réalisa bientôt, Houlagou retint le khodjah dans son camp, le comble de bienfaits et de distinctions et l’admit au nombre de ses favoris. Les renseignements et les conseils que Nassir-eddyn donna à ce prince, lui furent fort utiles pour le succès de son expédition contre Bagdad (voy. Houlagou et Mostasem). Houlagou, devenu maître de la Perse, charges Nassir-eddyn de faire construire un observatoire à Méragah, dans l’Adzerbaïdjan, d’y réunir tous les livres et les instruments nécessaires, le mit à la tète des astronomes qui y furent attachés, et lui confia la surintendance de tous les colléges établis dans son empire. Les fondements de cet observatoire furent jetés en djoumady 1er 657 (avril ou mai 1259). Nassir-eddyn dirigea l'observatoire de Méragah pendant douze ans ; il mourut le 18 dzoulhadjah 672 (25 juin 1274), et fut enterré à Bagdad, selon Aboul-Feda. Les nombreux ouvrages de ce khodjah attestent son érudition et son activité. Ses connaissances embrassaient toutes les matières. Les Orientaux le placent sur la première ligne de leurs savants, et l’égalent à Ptolémée, dont il avait traduit, commenté et corrigé le Tetra biblon et l’Almageste. Il a écrit sur la théologie et la jurisprudence des musulmans ; sur la philosophie, l’économie politique, la métaphysique, l’histoire naturelle. la géographie, la médecine, la géomancie. Mais c’est surtout comme astronome et mathématicien que Nassir-eddyn s’est rendu illustre. Il a perfectionné plusieurs instruments anciens particuliers à ces deux sciences, et il en a inventé de nouveaux, exécutés par lui-même ou d’après ses modèles[2]. Il fut chargé aussi de diriger la construction d’une mosquée et de faire monter l’eau jusqu’au sommet d’une montagne par des procédés hydrauliques. Nassir-eddyn n’était pas moins recommandable par ses qualités morales et sociales que par sa vaste érudition. On trouvera de plus grands détails sur la personne et les travaux de ce savant, ainsi que la liste d’un grand nombre de ses ouvrages, dans le Mémoire sur l'Observatoire de Méragah, par Jourdain, Paris, 1810, in-8° (tiré du Magasin encyclopédique, 1809, t. 6, p. 43 et 87). On a publié à Rome, dans la célèbre imprimerie des Médicis, la traduction arabe des treize livres des Éléments d’Euclide, avec un commentaire par Nassir-eddyn, 1594, in-fol. de 453 pages[3]. Mais c’est principalement par ses fameuses Tables ilkhaniennes (Zeídje-Ilkhany), fruit de ses observations astronomiques et résumé de celles qui avaient été faites avant lui, que ce savant a immortalisé son nom et la mémoire des deux princes auxquels il les a dédiées (Houlagou et son fils Abaca, surnommés Ilkhan). La Bibliothèque de Paris en possède un exemplaire, d’autant plus précieux qu’il est écrit de la main d’Asyl-eddyn, fils de ce grand astronome[4]. Greaves a traduit en latin et publié à Londres, en l652, une Table des longitudes et des latitudes, extraite des Tables ilkhaniennes de

  1. On trouve une analyse de cet ouvrage dans le tome 1e des Mémoires (Transactions) de la société littéraire de Bombay (Journal des savante, mars 1821, p. 132).
  2. Ces instruments, dont on peut voir la description dans l’Histoire de l’astronomie du moyen âge, p. 200, étaient en buis, et promettaient peu de précision. D-l-e
  3. La dernière page offre, en turc, le privilège du sultan Amurat II pour la vente du livre dans tous les États ottomans. C’est par erreur que l’abbé de Rossi a cru que l’Euclide arabe imprimé à Scutari au commencement du 19e siècle, était une réimpression de la traduction de Nassir-eddyn. Sylvestre de Sacy nous apprend (Mag. encyclop., 1814, t. ler, p. 208) que cette édition de Scutari. imprimée l’an de l’hégire 1216 (1801), est un ouvrage tout à fait different.
  4. Ces tables, qui ont été commencées par shâh Cholgius, supposaient le mouvement de précession d'un degré en soixante-dix ans