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qu’avec peine leurs projets ambitieux ; et après avoir employé tous les moyens pour les en détourner, il commanda à ses enfants de ne prendre aucune part à la Ligne. Ce prince mourut à Annecy le 25 juin 1585. Brantôme a laissé un portrait magnifique du duc de Nemours (Vies des grands capitaines français) :

« C’était, dit-il, un très-beau prince et de très-bonne grâce, brave et vaillant, agréable, aimable et accostable, bien disant, bien écrivant autant en rime qu’en prose, s’habillant des mieux... Il était pourvu d’un grand sens et d’esprit, ses discours beaux, ses opinions en un conseil belles et recevables ; ... il aimait toutes sortes d’exercices et si y était si universel qu’il était parfait en a tous, ... si bien que qui n’a vu M. de Nemours en ses années gayes, il n’a rien vu, et qui l’a vu le peut baptiser par tout le monde la fleur de toute la chevalerie. »

De Thou rend également justice à la valeur, à la prudence et aux talents de Nemours, et l’on doit regretter que sa mort prématurée l’ait empêché de terminer les Mémoires qu’il se proposait d’écrire sur les événements dont il avait été le témoin, et dans lesquels il avait joué un si grand rôle. Son portrait, gravé par Th. de Leu, a été reproduit dans différents formats.

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NEMOURS (Henri de Savoie, duc de), second fils du précédent, fut d’abord connu sous le nom de marquis de St-Sorlin. il était né il Paris en 1572 et il avait eu pour parrain le duc d’Anjou, depuis Henri III. Son père, ne voulant pas confier à des étrangers le soin de son éducation, l’emmena à Annecy, où il le fit élever sous ses yeux. Le duc de Savoie lui donna en 1588 le commandement d’une armée, avec laquelle Nemours s’empara du marquisat de Saluces. Oubliant les sages conseils de son père mourant, il se jeta dans le parti des ligueurs, entra dans le Dauphiné, révolté contre l’autorité royale, et fut nommé gouverneur de cette province, en 1591. Il s’approcha de Lyon, dans l’espoir de faciliter l’évasion de Charles-Emmanuel, son frère, prisonnier au château de Pierre-Cize ; mais toutes ses tentatives à cet égard échouèrent. Devenu duc de Nemours par la mort de son frère, il fit sa paix avec Henri IV et assiste en 1596 aux états de Rouen. Il se signala l’année suivante au siége d’Amiens. La guerre ayant éclaté bientôt après entre la France et la Savoie, au sujet du marquisat de Saluces, réclamé par Henri IV, il obtint de n’y prendre aucune part et se retira au château d’Annecy, où il faisait sa résidence ordinaire. Epris des charmes d’une princesse de Savoie, il demanda sa main ; et le refus qu’il éprouva le toucha si vivement, qu’il quitta la cour sans prendre congé, et vint cacher sa douleur à Seyssel. Le duc de Savoie, obligé de soutenir une nouvelle guerre contre les Espagnols, ne tarda pas à se repentir d’avoir mécontenté un prince dont l’expérience et les talents militaires

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lui auraient été si utiles ; il lui dépêcha successivement plusieurs gentilshommes chargés de l’apaiser ; et le duc de Nemours s’engagea de conduire en Italies un corps de troupes levé dans les terres de son apanage. Mais, séduit pairles promesses des Espagnols, il différa son départ sous différents prétextes et finit par se retirer dans le comté de Bourgogne, où, d’après les assurances qu’on lui avait données, il devait trouver une armée prête à occuper la Savoie : Trompé dans son attente, il entra en négociation avec le prince de Piémont et fut rétabli dans tous ses biens qui avaient été saisi. Le duc de Nemours revint alors en France, où il épousa en 1618 Anne de Lorraine, fille unique du duc d’Aumale. Il se fit remarquer à la cour par son goût pour les fêtes, et fit représenter un grand nombre de ballets de son invention ; genre dans lequel, dit l’abbé de Marolles, il avait des pensées rares, comme il les avait en toutes autres choses (Voy. les Mémoires de Marolles, t. 1er ). Ce prince mourut à Paris le 10 juillet 1632. Son corps fut rapporté à Annecy et inhumé dans le tombeau de son père, avec une épitaphe transcrite par Guichenon (Hist. généalog. de le maison de Savoie). À l’exemple de son père, ce prince aimait les lettres et les arts ; et ce fut sous sa protection qu’Annecy devint le berceau d’une académie, fondée en 1606, et qui ne fut pas sans célébrité (voy. Favre).

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NEMOURS (Henri II de Savons, duc de), fils cadet du précédent, naquit à Paris en 1625. Destiné à l’état ecclésiastique, il fit ses études avec beaucoup de succès et fut nommé en 1651 à l’archevêché de Reims. La mort de Charles-Emmanuel, son frère, tué en duel par le duc de Beaufort, l’ayant déterminé à renoncer à un état qu’il aurait honoré par ses vertus, il épousa en 1657 Marie d’Orléans, fille unique du duc de Longueville. Ce mariage étonna beaucoup ; on ne comprenait pas que la plus riche hénitière de France voulut épouser un cadet, dont l’esprit était assez scolastique, la personne défigurée par une facheuse maladie à laquelle il était sujet, sans bien, sans établissement et sans considération (Voy. les Mémoires de mademoiselle de Montpensier, t. 4, p. 24). Il parait que mademoiselle de Longueville se repentit d’avoir donné son consentement à cette union ; mais il était trop tard. Le duc de Nemours fut saisi par la fièvre en sortant de l’église, et de ce moment il n’eut pas un seul instant de santé. Il mourut le 2 janvier 1659. Son cœur fut dépose dans l’église St-Louis des jésuites, comme il l’avait demandé expressément, et son corps transporté dans le tombeau de sa famille, à Annecy. En lui finit la branche des princes de Savoie-Nemours, établie en France. La duchesse de Nenmours, sa veuve, lui survécut longtemps, fut reconnue en 1694 souveraine de la principauté de Neuchâtel, par les états du pays, a l’exclusion du prince de Conti, et mou-