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suivit Charles-Quint en France ; et quoique protestant zélé, l’aida puissamment à détruire la ligue de Smalkalde. L’Empereur lui donna l’investiture de l’électorat de Saxe, dont son cousin avait été déclaré déchu ; mais Maurice ne put obtenir la liberté du landgrave de Hesse, son beau-père, fait prisonnier à la bataille de Muhlberg. L’ambition, dit Voltaire, l’avait porté à seconder les vues de Charles-Quint ; l’ambition le détacha de ce prince. Il s’unit, en 1551, contre lui, avec l’électeur de Brandebourg, le comte palatin, le duc de Wurtenberg, et plusieurs autres princes. Cette ligue, dont le prétexte était la délivrance du landgrave de Hesse, était appuyée par le roi de France Henri II et pouvait devenir plus dangereuse que celle de Smalkalde. Chargé de faire le siège de la ville de Magdebourg mise au ban de l’Empire, Maurice, loin de le pousser avec vigueur, favorise les habitants, qui se rendent enfin par capitulation. De concert avec ses alliés, il marche ensuite sur Iuspruck, dans l’intention d’y surprendre l’Empereur ; mais ce prince échappe à ses ennemis et se retire dans Passau, où il signe, le 12 août 1552, le traité célèbre qui rend aux protestants, avec le libre exercice de leur religion, les droits dont ils avaient été privés après la victoire de Muhlberg. Maurice reçoit de la chambre impériale l’ordre d’exécuter la sentence rendue contre le margrave de Brandebourg, comme perturbateur de la paix publique : le 9 juillet 1553, il taille en pièces l’armée du margrave près de Siverhausen ; mais il meurt deux jours après des blessures qu’il avait reçues dans le combat, à l’âge de 32 ans, avec la réputation d’un grand capitaine et d’un habile politique.

― HENRI, dit le Pieux, père de Maurice, ne se fit d’abord connaître que par une dévotion excessive. Suivant l’usage du temps, il se rendit en pèlerinage à St-Jacques de Compostelle et jusqu’à la terre sainte. À son retour de l’Orient, il embrassa la réforme de Luther qu’il introduisit dans ses États, et dont il se montra constamment le zélé défenseur, Il mourut le 19 août 1541, à l’âge de 68 ans.

― Son fils Auguste, mort en 1586, fut aussi surnommé le Pieux (voy. AUGUSTE). Son arrière-petit-fils Jean-Georges 1er, mort en 1656, fut le bisaïeul de l’électeur Frédéric-Auguste II, roi de Pologne (voy. AUGUSTE).

W-s.


SAXE (Henri le Lion, duc de). Voyez BAVIÈRE.


SAXE (Maurice, comte de), l’un des guerriers les plus illustres du 18e siècle, naquit à Dresde, le 19 octobre 1696. Il était né des amours d’Auguste II, électeur de Saxe, roi de Pologne, et de la comtesse Aurore de Kœnigsmarck, qui était issue d’une des premières familles de Suède. Le jeune Maurice, élevé dans tous les exercices militaires, n’avait pas encore douze ans qu’on le vit arriver à pied au camp des alliés devant Lille. Le roi Auguste servait a ce siège comme volontaire : il confia son fils au comte de Schulembourg, général de ses troupes (voy. SCHULEMBOURG). Mau

SAX

rice fit donc ses premières armes contre la France et dans les mêmes champs où il devait un jour combattre si glorieusement pour elle. L’année suivante (1709), il fut employé au siége de Tournai : il y eut un cheval tué sous lui, et son chapeau fut percé d’une balle. À la bataille de Malplaquet, on vit un enfant de treize ans conserver son sang-froid au milieu du plus effroyable carnage. Le roi Auguste l’envoya servir contre les Suédois, et lui donna le commandement d’un régiment de cavalerie. Ce régiment ayant été détruit, Maurice retourna en Saxe pour le recruter. Quoiqu’il n’eût encore que quinze ans, sa mère profita du retour inopiné de ce fils chéri pour lui faire épouser l’héritière des comtes de Loben, qui était à peu près du même âge. La guerre civile qui se faisait en Pologne appela Maurice dans ce royaume pour y soutenir les droits d’Auguste II contre les confédérés. C’est dans cette campagne que, cerné à l’improviste dans le village de Craknitz, il y fit, à la tête d’une poignée de soldats et de valets, une défense si vigoureuse, qu’elle fut unanimement comparée à celle que Charles XII venait de faire à Bender. Le comte de Saxe ne tarda pas à voir s’accomplir un vœu qu’il formait depuis longtemps : il était dans l’armée qui assiégeait Stralsund, que ce prince célèbre défendait en personne. « J’ai eu enfin la satisfaction, écrivait-il au roi son père, de me trouver face à face avec Charles XII ; je l’ai vu habillé comme un de ses soldats, et se battant plus bravement qu’aucun d’eux. » Maurice revint a Dresde (1716) et trouva sa femme accouchée d’un fils qui ne vécut point ; c’est le seul enfant qu’il ait eu de son mariage. Un ministre tout-puissant s’étant permis une injustice à son égard, Maurice de Saxe alla porter plainte au roi ; mais dans des termes si peu mesurés, qu’il attira sur lui la colère du monarque. Il prit la fuite et ne reparut que lorsque sa mère eut obtenu son pardon ; mais ne pouvant rester en repos, il courut en Hongrie se ranger sous les drapeaux du prince Eugène. Ce grand capitaine assiégeait alors Belgrade. Le comte de Saxe trouva près de lui le comte de Charolais et le prince de Dombes. On croit que c’est dans la société de ces princes français qu’il prit du goût pour leur nation. Revenu de nouveau à Dresde, après la campagne de Turquie, la vie de cour lui devint à charge. Il était extrêmement galant, et la comtesse sa femme extrêmement jalouse. Il partit brusquement pour Paris et fut présenté au duc d’Orléans, régent, par les deux princes qu’il avait connus à l’armée de Hongrie. Le régent lui proposa d’entrer au service de France avec le grade de maréchal de camp (1720). Le jeune comte accepta sous la condition toutefois qu’il irait demander l’agrément du roi son père. Il profita de ce voyage en Saxe pour faire prononcer son divorce, et revint en France, où il prit le commandement du régiment allemand de Greder. Il s’appliqua à dresser ce