Page:Michaud - Biographie universelle ancienne et moderne - 1843 - Tome 4.djvu/16

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BBB était gratuite ; il s’était de bonne heure retiré du commerce et vivait dans sa maison de campagne, sur les bords de la Saône, mèlant l’étude et la culture des lettres aux travaux de l’agriculture. C’est dans cette douce retraite qu’il appela et qu’il retint pendant plusieurs années son frère, tandis que la république achevait de s’user dans Panarchie avant de se perdre dans le despotisme. Ses opinions politiques n’étaient rien moitie que favorables aux gouvernements consulaire et impérial. Tous ses regrets étaient dans le passé de la monarchie, et tous ses vœux pour son retour. Il appartenait à ce qu’on appelait en France la petite église, et il s’était rattaché à la minorité du clergé qui refusait de reconnaître le concordat de 1801. Il salua avec joie la restauration, mais il l’eût voulu complète, et la charte lui parut une monstruosité ; il résolut de l’attaquer, et il fut moins heureux que son frère, qui avait combattu avec tant de succès l’acte constitutionnel du sénat, et qui d’ailleurs n’était point enncmirle la charte, du moins dans Pcnsemble de ses diSp0Sitions. Alexandre IIt imprimer, à Lyon, en 1816, chez J.·M. Boursy, un vol. in-8° de 290 pages, qui avait pour titre : réfutation des faux principes et des calomnies avancées par les jacobim pour décrier l’administration de nos rois et justifier Vusurpation de l’autorité royale et du trône, par un vieux Français. Ce livre est curieux et hardi : l’auteur y regarde la charte constitutionnelle comme illégitime et irrégulière ; il soutient que Louis XVIII peut et doit la réformer ; il dénie aux chambres le droit de participation au pouvoir législatif ; il blàme la protection accordée aux cultes non catholiques, et la confirmation de la vente des biens nationaux : « Les véritables Français, dit-il, ne reconnaissent plus leur a patrie sous le régime de cette charte ; ils ont vécu sous l’empire de nos anciennes lois qui condamnaient toutes les injustices, et on leur présente aua jourd’hui des lois nouvelles qui autorisent l’usurpation des biens enlevés à l’Église et aux défenseurs de la royauté légitime"., La charte ne peut donc que prolonger les divisions qui existent parmi nous, au lieu de les faire cesser, car les vrais Français ne sauraient en adopter les principes. Cette nouvelle constitution n’a pour partisans, dans nos en provinces, que les factieux qui prétendent y trouver un appui ; elle est vantée par les possesseurs de biens nationaux, dont elle autorise la scandaleuse acquisition". Mais les factieux, les acquéreurs de biens nationaux et les amateurs d’idées libéa rales ne composent pas la nation ; ils n’en forment heureusement que la moindre partie, etc. » Ce livre était légalement et politiquement répréhensible. Le tableau analytique que l’auteur donne de la constitution anglaise, et son exposition rapide des révolutions de ce pays, sont cependant des morceaux

; très remarquables. Mais il eut besoin de la considération

méritée dont il jouissait parmi ses concitoyens, l pour n’être pas traduit devant les tribunaux. C’était quelque temps après l’ordo nuance du 5 septembre,

; qu’A exandre Bergasse allait publier son ouvrage

déjà imprimé. À peine le préfet du Rhône (M. Cha- u

BBB 11 brol de Creusot, depuis député et ministre) en futil informé qu’il fit appeler l’auteur, et lui représenta la nécessité où se trouverait le gouvernement de le poursuivre et de faire condamner son livre s’il ne consentait lui-même à sa suppression. Bergasse déféra aux représentations bienveillantes du magistrat ; le livre ne fut pas mis en vente, et il est devenu très-rare, n’y ayant eu qu’un très-petit nombre d’exemplaires donnés à des amis. Alexandre Bergasse mourut à Lyon en 1821. — Son fils, Alphonse, héritier de ses vertus et de son talent, nommé, en 1822, avocat général à la cour royale de Rouen, depuis procureur général à la cour de Montpellier, donna sa démission après la révolution de 1850 (le 17 août). V-vn.


BERGASSE-LAZIBOULE (Gmane), ancien officier d’artillerie, de la même famille que les précédents (il était cons’de Nicolas et d’Alexandre ), forma, avec Vadier, Edéputation du tiers état de la sénéchaussée de Pamiers aux états généraux. llcombattit, comme Nicolas Bergasse, son collègue et son parent, l’émission des assignats, qu’il déclara antipatriotiques, faits pour détruire les finances et tromper le peuple. Comme son même collègue encore, il attaque le compte des finances de Montesquieu, qui se vit obligé de répondre à ses accusations : mais lit. finit l’identité de conduite des deux Bergasse constituants. Celui de Pamiers se signala comme un ardent ami de la révolution, et, dans les pamphlets du temps, on l’appela Bergasse Penragé, plutôt sans doute pour le distinguer de son cousin, que pour caractériser ses opinions ; car, comparées à d’autres, elles auraient paru modérées. Néanmoins, pendant le règne de Panarchie, il passa pour avoir des relations intimes avec Vadier, et même pour partager ses opinions frénétiques. Il était substitut du commissaire du directoire exécutif près les tribunaux de l’Arriége, lorsqu’il fut nommé membre du conseil des cinq-cents, dans l’an 6 (1798). Il fit décider, en applaudissant a l’arrèté qui ordonnait la célébration du 9 thermidor, que, dans son discours, le président du conseil rappellerait avec éloge les tristes victoires du 15 vendémiaire au 4 et du 18 fructidor an 5. Cette proposition, vivement combattue, ne fut adoptée qu’à la seconde épreuve. Les présidents des deux conseils, Lavaux (des anciens), Lecointe-Puyravoan (des cinq-cents), célébrèrent donc, à la manière du temps, les événements des trois journées, dans le champ de Mars. Cette fête fut d’ailleurs magnifique, car on y vit figurer, sur des chars tt forme antique, les premiers fruits de nos victoires : la Vénus de Médicis, la Transfiguration de Raphaël, le Gladiateur mourant, le Laocoon, l’Apollon du Belvédère, l’Hercule Commode, et les bustes d’Homère et de Brutus, avec un ours de Berne, un lion du désert de Zara, les pétrifications de Vérone, tous les savants, tous les artistes de la capitale ; et l’on chanta une ronde dont le refrain était : Rome n’est plus dans Rome, elle est toute à Paris. Les fêtes nationales étaient alors multipliées, on les jetait au peuple comme distraction de ses malheurs. On célébra, la même année, dans toute la France, les anniversaires du 14