Page:Michaud - Biographie universelle ancienne et moderne - 1843 - Tome 40.djvu/426

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


SUI

Wolf est tombé dans un excès contraire, trompé par quelques additions faites à son lexique par des écrivains postérieurs à Suidas. L’opinion la plus probable est qu’il florissait à la fin du 9e et dans les premières années du 10e siècle. L’ouvrage de Suidas est une compilation faite presque sans choix et sans jugement. Des copistes ignorants sont encore venus ajouter aux fautes du premier auteur, en insérant dans le texte des notes qui ne font plus qu’embrouiller les passages qu’elles devaient éclaircir. Malgré tous les défauts qu’on est en droit de lui reprocher, ce lexique n’en est pas moins d’une haute importance, par le grand nombre de fragments qu’on y trouve d’écrivains qui ne nous sont point parvenus, ainsi que par les détails vraiment curieux qu’il présente sur les poètes, les orateurs et les historiens de l’antiquité. C’est un trésor d’érudition, sans le secours duquel l’histoire littéraire des Grecs et des Romains aurait offert d’immenses lacunes qu’il n’eût jamais été possible de remplir. La première édition de Suidas est due à Démétrius Chalcondyle ; elle parut à Milan, 1499, in-fol. ; elle est assez belle, mais faite sur un manuscrit peu complet. L’édition aldine, Venise, 1516, présente parfois des différences assez sensibles ; elle a été donnée d’après un autre manuscrit ; elle a été reproduite à Bâle, en 1544, in-folio. On fait peu de cas de l’in-folio publié en 1619, Coloniae Allobrogum (en réalité à Genève), et dont le titre a été rafraîchi en 1630. Il faut ensuite franchir un long intervalle pour arriver au Suidas (Cambridge, 1705, 3 vol. in-fol.) avec d’amples commentaires, publié par Ludolphe Kuster ; la traduction d’Emile Portas, jointe au volume de 1619, a été corrigée en beaucoup d’endroits ; le texte grec a été revu sur divers manuscrits. On a reproché à l’éditeur des corrections téméraires et quelque légèreté dans son travail[1]. Suidas n’était pas un auteur qu’il fût nécessaire de réimprimer souvent ; ce ne fut qu’en 1834 qu’il reparut, grâce au zèle d’un habile helléniste anglais, Thomas Gaisford (Oxford, 3 vol. in-fol.). Le texte, revu avec soin et accompagné de notes savantes, a obtenu l’approbation des érudits ; la beauté de l’impression répond à ce que produisent habituellement les presses d’Oxford ; le troisième volume est entièrement consacré à l’index. Un Allemand, G. Bernhardi, entreprit de faire reparaître à Halle le travail de Gaisford, avec quelques additions dans le commentaire. Commencée en 1834, cette édition, qui forme quatre tomes in-4o, n’a été achevée qu’en 1853. M. Emmanuel Bekker, celui de tous les érudits contemporains qui a publié le plus de textes grecs, s’est aussi occupé de Suidas, et l’a fait paraître à Berlin, en 1854, grand in-8o. Le texte est revu avec soin sur divers manuscrits ; il n’y a point de traduction. La version latine de Jérôme Wolf a été imprimée à Bâle, en 1564 et en 1581 ; mais personne n’a songé à traduire Suidas en une langue moderne. Après Kuster, beaucoup de savants, parmi lesquels on doit citer Jacq. Gronove, Et. Bergler, Laur. Bos, Théod. Hase, Louis Valkenaer, se sont occupés de rétablir ou d’expliquer des passages de Suidas. Le Recueil de l’Académie des inscriptions contient les corrections de l’abbé Sellier, de Ste-Croix, etc. Louis Schultze a publié : Specimen observationum miscellanear, in Suidam, Halle, 1761, in-4o ; John Toup : Emendationes in Suidam, Londres, 1760, 1764, 1775, 3 vol. in-8o (voy. TOUP). Enfin Chardon de la Rochette, après avoir donné dans le Magasin encyclopédique des éclaircissements sur quelques articles de Suidas, les a réunis dans ses Mélanges de critique, t. 1, p. 92. J.-Gh.-Gottl. Ernesti a tiré des lexiques de Suidas et de Favorinus (voy. ce nom) tous les passages relatifs aux cultes anciens, et les a publiés avec des notes, sous le titre de Glossae sacrae, Leipsick, 1786, in-8o. On conserve, à la bibliothèque publique de Leyde, un Lexique étymologique attribué par Gronove à Suidas, lequel a successivement appartenu à H. Estienne, Goldast et Vessies. Voyez Muller, Programma de Suida cum observationibus T. Reinesii, Leipsick, 1696, in-8o.

W-s et B-N-T.

SUINTILA, vingt-troisième roi des Visigoths d’Espagne. donna des preuves de sa valeur, avant de parvenir au trône, en soumettant les Asturiens révoltés. Devenu roi, en 622, par l’élection des grands, il s’occupa de réformer les lois et de protéger le peuple contre l’oppression des ducs et des comtes. Il prit les armes, dans la première année de son règne. pour s’opposer aux irruptions des Gascons, qui désolaient la Biscaye et la Navarre, et, à la tête d’une armée nombreuse, il les défit sur les bords de l’Ebre. Les Gascons durent à son humanité la sûreté de leur retraite, le vainqueur n’ayant exigé d’eux que la restitution du butin et d’une forteresse qu’on croit être Fontarabie. Ce prince acheva de chasser de l’empire d’Orient les Romains qui s’étaient maintenus dans la province d’Algarve et qui y conservaient encore deux généraux. Il vainquit l’un par ses armes et parvint à gagner l’autre par ses libéralités. Mais son caractère parut changer tout à coup. Il foula ses sujets, qu’il avait gouvernés jusque-là avec douceur. Les grands se soulevèrent et appelèrent à leur secours Sisenand, gouverneur de la Gaule gothique. Suintila marcha contre lui et déjà les deux armées étaient en présence lorsque ses propres soldats, gagnés par son rival, s’écrièrent qu’il fallait le déposer. Sisenand fut proclamé roi, et Suintila n’eut que le temps de fuir et de se cacher dans une retraite où il mourut quelque temps après.

B―P.

  1. Cette édition est précédée d’une dissertation sur Suidas que Fabricius a recueillie dans la Bibliotheca graeca, t. 9, p, 621, et il a fait suivre cette dissertation de trois index : 1o des auteurs qu’a dû consulter Suidas ; 2o des écrivains sur lesquels il offre des renseignements ; 3o de tous les personnages qui y sont cités.