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Page:Michaud - Biographie universelle ancienne et moderne - 1843 - Tome 45.djvu/221

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Navarre, dans les dernières années du 12e siècle. Il fit ses premières études dans la Castille, puis à Paris ; revint dans sa patrie, et fut reçu novice dans le couvent de St-François à Tolède. Il s’éleva ensuite par son mérite et ses vertus à la dignité d’archevêque de cette ville et à celle de cardinal. Inviolablement attaché à la famille royale de Castille et très-zélé pour les intérêts de la religion, il fit souvent la guerre contre les infidèles, et, selon l’usage de ces temps-là, il combattit en personne à plusieurs batailles, notamment à celle de Talaraca. Dans les circonstances les plus difficiles, il fut l’âme et le conseil de son souverain ; et l’Espagne lui dut en grande partie l’expulsion des Maures. Ces importantes occupations ne l’empêchaient pas de se livrer avec beaucoup d’exactitude à l’administration de son diocèse. Dans toutes les occasions il se montra fort jaloux des droits de son siége. L’archevêque de Tarragone l’ayant excommunié, parce qu’en sa qualité de primat d’Espagne Ximenès avait marché la croix levée dans le territoire de sa métropole, celui-ci se rendit à Lyon auprès du pape Innocent IX, qui y tenait un concile, pour se plaindre de cet affront. Le pontife l’accueillit avec beaucoup d’égards, et prononça en sa faveur une décision qui ne le satisfit cependant pas entièrement. Ximenès tomba malade en retournant en Espagne, et il mourut sur le Rhône, le 9 août 1247, dans un bateau où il s’était embarqué. Ses restes furent transportés au monastère des bernardins à Huerta. sur les frontières de l’Aragon, où l’on voit encore son tombeau avec l’épitaphe dont voici la traduction : la Navarre est ma mère, la Castille ma nourrice, Paris mon école, Tolède ma demeure, Huerta ma sépulture, le ciel mon repos. On a de Roderic Ximenès une Histoire d’Espagne en neuf livres, qui se trouve dans le recueil des historiens de ce royaume, avec des remarques du P. André Schott. Cet ouvrage finit à la vingt-sixième année du règne de St-Ferdinand, roi de Castille. C’est un monument précieux, mais on doit se défier en le consultant du zèle patriotique et religieux de l’auteur. Ximenès a encore donné une Histoire du Ostrogoths, une Histoire des Huns et des Vandales, une Histoire des Arabes, de 770 à 1150, et enfin une Histoire de Rome, depuis Janus jusqu’à l’an de la république 708. Tous ces ouvrages ont été publiés par André Schott, à la Suite de l’Histoire d’Espagne de Roderíc, dans le tome 2 de l’Hispanía illustrata. L’Histoire des Arabes a été publiée par Th. Erpenius à la suite de l’Historia saracenica d’Elmacin, Leyde, 1625, in-fol. et in-lv. — Ximenès (François), né à Gironne à la fin du 13e siècle, fut évêque d’Elvas, et fit imprimer un ouvrage remarquable sous ce titre : De vita angelica.

XIMENÈS DE CISNEROS (François), archevêque de Tolède, cardinal et régent d’Espagne pendant la minorité et fabsence de Charles-Quint, naquit dans une petite ville de la Castille en 1437. La noblesse de sa famille est contestée ; et la jalousie excitée par son élévation lui fit souvent un reproche de l’obscurité de sa naissance. Cependant il appartenait, par sa mère, à une ancienne et honorable maison ; mais une place de receveur des décimes était la seule ressource qu’eût son père pour élever une nombreuse famille. Destiné d’abord à succéder à cet emploi, Ximenès eût été enseveli dans la même obscurité, si son caractère ne se fût déclaré par son aversion pour l’état auquel il semblait appelé, et surtout par un noble désir d’apprendre, qui le conduisit à l’université de Salamanque, la plus savante qu’il y eût alors en Espagne. À l’étude de la philosophie et de la théologie, du droit civil et du droit canon, il joignit celle des langues orientales. Après avoir reçu les ordres sacrés, il professa quelque temps le droit ; et, lorsque ses ressources pécuniaire : lui permirent d’entreprendre un voyage à Rome, il partit plein d’espoir pour une fortune que lui révélait son génie, mais qui devait-se faire acheter par bien des traverses. Dépouillé d’abord par des voleurs, il dut à un ancien condisciple les moyens d’achever son voyage et de subsister jusqu’à ce qu’il pût lui-même pourvoir à ses besoins, en plaidant les causes des Espagnols devant les tribunaux ecclésiastiques de Rome. La réputation qu’il acquit dans cet emploi lui valut du pape Sixte IV une bulle d’expectative pour le premier bénéfice vacant dans le diocèse d) :Tolède. Rappelé en Castille par la mort de son père, Ximenès saisit bientôt l’occasion que lui offrit la vacance de l’archiprètré d’Uceda pour s’en mettre en possession, en vertu de la bulle qui lui avait été donnée. L’archevêque, qui déjà en avait disposé, refusa son consentement ; mais le jeune ecclésiastique, fort de son bon droit et de son caractère, entreprit la lutte. Il fut enfermé dans la tour d’Uceda, où l’on raconte qu’un vieux prêtre, depuis longtemps prisonnier, qui prédit qu’un jour il serait archevêque de Tolède. Mais loin de ces rêves de fortune, il fallait, pour arriver à la possession du bénéfice qui lui était dû, supporter des épreuves qui eussent certainement lassé tout autre courage. Ce fut après six années d’inutiles persécutions que l’archevêque se vit enfin obligé de céder ; mais Cisneros permuta aussitôt cet archiprêtre, pour devenir grand vicaire de Sigueuça, sous le cardinal Gonzalès de Mendoza, dont la réputation l’attirait. L’estime et la confiance de ce prélat mirent les talents de Ximenès dans un très-grand jour ; et sa fortune paraissait déjà s’avancer, lorsqu’il l’arrêta lui-même, en résignant ses bénéfices à l’un de ses frères, pour faire profession chez les cordeliers de Tolède. Mais il ne pouvait échapper à la célébrité ; on accourait à ses sermons ; on voulait se ranger sous sa direction. Pour se soustraire à ces empressements, il se retira dans le couvent du Castagnar, situé au milieu des bois. Là une cabane