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rique fût réservé pour l’intérieur des colléges habités par les mages, les Perses étaient souvent rappelés par la voix de leurs prêtres a la véritable manière de concevoir la religion et les êtres supérieurs ; et ces hautes idées exercèrent sur eux une utile influence. Le principe de dualité ne fut pas moins avantageux à la nation, en persuadant aux individus que la vie n’est qu’une lutte contre le fatal Ahriman. De là l’énergie, l’activité, la puissance morale développée avec grandeur et éclat ; aussi voit-on le peuple de l’Iran, tant que le mahométisme n’a point détrôné la paisible religion de Zoroastre, commander en maître à une partie de l’Asie, et tenir un rang parmi les grandes nations. Il n’en est pas de même chez les Hindous, leurs voisins, pour qui le dogme de l’union à Dieu, considérée comme l’état de sainteté, a singulièrement affaibli le dualisme qui fait le fond de toutes les religions. Ici, l’abnégation de l’individualité, le sacrifice du moi, la contemplation, l’absorption de l’âme en Dieu ; voilà la suprême béatitude et la plus haute perfection : chez les Perses, au contraire, le principe vital, individuel, agit sans cesse virilement, et tient tendus les ressorts de l’âme. Outre cette influence salutaire qui fait du zoroastrisme la première des religions païennes, les prescriptions liturgiques sont presque toujours admirables par le but d’utilité générale auquel l’auteur semble aspirer. Sous les images de la lumière et des ténèbres se révèle définitivement un système d’économie politique dont l’agriculture est la base. Ormuzd est la source de tout bien : tout germe et croit sur la terre par sa parole. Or, l’adorateur d’Ormuzd doit être ici-bas son représentant et son imitateur. Le royaume de Gustasp doit être l’image fidèle de l’empire d’Ormuzd ; et tandis que le Touran, royaume visible d’Ahriman, est en proie au désordre et au malheur, l’Iran sera semblable aux paradis, par lesquels le grand être débuta dans la création : « O Sapetman Zoroastre, dit Ormuzd dans le Zend, j’ai créé un lieu de délices et d’abondance. Personne ne saurait en créer un pareil. Si cette terre de bonheur n’était venue de moi, ô Sapetman Zoroastre, aucun être n’aurait été capable de la créer. Elle se nomme Eeriene Veedjo, et elle surpassait en beauté le monde entier tant qu’il peut s’étendre. Rien ne fut jamais comparable à Eeríene Veedjo. » Ainsi, quiconque cultivait la terre honorait par là même Sapandomad, génie chargé de veiller à cette planète : pour lui, Khordad faisait couler ses ondes bienfaisantes, et Amerdad couvrait les arbres et les jardins de sa protection. De là résultait aussi la réprobation du jeûne, qui, loin d’être méritoire chez les mages, n’était pas même permis. Même interdiction sur le célibat. La sainteté spéculative n’est pour eux qu’un mot vide de sens, ou, pour mieux dire, il n’en est pas même question. Les purifications, l’entretien éternel du feu sacré que rien ne doit souiller,


et qu’il est expressément défendu de souffler avec la bouche, indiquent avec quel soin l’homme doit veiller sur lui-même et prendre garde de laisser ternir la pureté du cœur par le souffle du vice. Viennent ensuite les institutions politiques, la division du peuple iranien en castes, la nécessité d’obéir aux autorités qui viennent d’Ormuzd ou des lzeds, ses ministres, enfin la hiérarchie religieuse. À cette époque reculée où tout est indécis et naïf, les pouvoirs ne sont pas encore séparés, et l’espèce d’église ou société mystique que forment les Mazdeianíens, fidèles disciples des successeurs de Zoroastre, n’est que l’ombre et le reflet de la société politique bien plus réelle, et où le roi commande avec toute l’autorité d’un maître absolu, mais en se reconnaissant soumis à une loi unique et sacrée, qui a tout prévu comme la Providence, et qui comme elle se déclare compétente pour tout régir. — Les anciens attribuaient à Zoroastre un grand nombre d’ouvrages qui certainement étaient apocryphes. Tels sont entre autres ces traités sur es pierres, sur les plantes, sur l’art divinatoire, cités par Pline. Tel est l’Aiar Dehkarder, ou livre des mages, que lui attribuent les Parsis (voy. Placcius, Theatrum anonymorum, t. 1, chap. 6, n° 1298). Tel est aussi le livre des dogmes de la théologie chaldéenne, avec une exposition de celle des Perses et des Grecs, manuscrit qui se trouvait à la bibliothèque de Pic de la Mirandole, et qui fut perdu à sa mort. On doit peu regretter cette compilation d’un faussaire maladroit, si, comme l’écrit Heurn à Marsile Ficín (Philosoph. Barbar., comm. du livre 2, p. 123), le style en était inintelligible pour Pic de la Mirandole lui-même. Il ne faut pas tout à fait reléguer dans cette classe la courte mais célèbre collection dite Oracles magiques, en grec Λόγια μαγικά. Cet opuscule imprimé séparément, d’abord en grec, et avec des scolies dans la même langue (sous le titre de May. Λόγ. τών άπό Ζωροάστρον μάγων), Paris, Tilet, 1538, in-4o, en grec, 1564, in-8o, traduit en latin, par Jacques Marthanus, médecin à Paris, et publié avec un commentaire, Paris, 1539, in-.4°, ibid., 1558, donné de nouveau par Frédéric Morel (Zoroastris seu Majorum qui a Zoroastre prodierunt oracula heroíca), Paris, 1595, 1597, in-4o, avec une traduction en vers latins, et par le savant Patrizi (Magia philosophica, h. s. Fr. Patricii Zoroaster et ejus 320 oracula Chaldaica), Hambourg, 1593, in-16, et Venise, même année, in-fol., avec un traité sur les universaux, a été inséré depuis à la suite des Oracles des sibylles, Bâle, Opsop., 1599, in-8o, et 1607, in-8o, dans l’Histoire latine de la philosophie, par Stanley, dans la Phílosophia barbarorum de Heurn, enfin dans le Trinus Magicus de César Longin, 1630, in-16. Les éditions d’opsopæus, Bâle, sont principalement remarquables en ce qu’elles contiennent les commentaires de Psellus et de Gemiste Plethon sur les Oracles. Ceux-ci avaient déjà


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