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d’Ajax et d’Ulysse pour les armes d’Achille, etc.

CONDÉ (Louis Ier de Bourbon, prince de), naquit à Vendôme, le 7 mai 1550, de Charles de Bourbon, duc de Vendôme. Lorsqu’il vint à la cour, on lui donna une place de simple gentilhomme de la chambre, avec 1 200 liv. d’appointements. Condé était ambitieux, mais trop fier pour rechercher la protection des Guises, qui disposaient alors de tous, les emplois. Le connétable de Montmorenci redoutait leur funeste influence, et, voulant se faire un appui contre eux, fit épouser à Condé Éléonore de Roye, sa petite-nièce. Les Guises prévirent les suites de ce mariage, et tentèrent de l’empêcher, mais inutilement. Condé se rendit ensuite en Piémont ; il y fit ses premières armes, comme volontaire, sous le maréchal de Brissac, qui ne parvint pas toujours à tempérer son impétuosité naturelle, en lui représentant qu’elle était un obstacle à l’ensemble des opérations de l’armée. Le désir de trouver l’occasion de se signaler le détermina à s’enfermer dans Metz, assiégé par Charles-Quint (1552), et défendu par le duc de Guise. Mêlé dans les rangs des soldats, il se trouva partout où il y avait du danger, et partout il fit son devoir. Une pareille conduite semblait devoir lui mériter les faveurs de la cour. Il sollicite le gouvernement de Picardie ; on le lui refuse, et, le cœur ulcéré de cet affront, il retourne en Piémont. La puissance des Guises, toujours croissante, n’a plus de bornes à la mort de Henri II. Condé, incapable de dissimuler la peine qu’il en éprouve, est éloigné, sous le prétexte d’une ambassade en Flandre, et en même temps on’ lui refuse les sommes nécessaires pour la représentation. Sa haine contre les Guises s’en accrut, et elle devint si forte, que, dans la première assemblée des seigneurs mécontents, il proposa de prendre les armes pour les chasser du royaume : cet avis fut rejeté. Cependant les réformes, dont les persécutions augmentaient le nombre, résolurent d’obtenir, par la force, des concessions refusées à leurs prières. La Renaudie, qui regardait, avec tous les réformés, les Guises comme les seuls auteurs de leurs maux, s’avance vers Amboise où était la cour, dans l’intention de s’emparer de leurs personnes. (Voy. Renaudie.) Ce projet est découvert, et la Bigne, secrétaire de la Renaudie, appliqué à la question, déclare que le prince de Condé devait se mettre à la tête des protestants, si la conjuration eût réussi. D’autres témoignages viennent à l’appui du premier, et Condé, gardé à vue, est obligé de se justifier publiquement. L’assurance qu’il mit dans ses réponses ne permet pas de croire qu’il eût réellement trempé dans la conjuration. Il le nia solennellement ; et provoqua en champ clos quiconque lui ferait un reproche ou élèverait un doute sur sa conduite. Le duc de Guise, que ce défi regardait particulièrement, offrit au prince d’être son second contre tous ceux qui oseraient l’accuser, et une affaire qui avait eu des commencements si sérieux se termina de part et d’autre par des politesses. Peu de temps après, Condé quitta la cour et se retira à Nérac, près de son frère le roi de Navarre, où il lit profession ouverte de calvinisme. Ceux des seigneurs qui lui étaient attachés vinrent le visiter dans sa retraite, et un nouveau plan fut arrêté entre eux pour bannir les Guises du royaume. Ce plan fut encore découvert ; mais les lettres dont la Sagues, secrétaire de Condé, fut trouvé porteur, ne laissèrent plus aucun doute sur la part qu’y avait prise le prince. Les Guises furent d’avis de garder le secret sur ces lettres, jusqu’à ce que leur auteur fait arrêté ; la convocation des états généraux à Orléans (octobre 1560) fut le prétexte dont on se servit pour l’attirer à la cour. Il hésita s’il s’y rendrait ; la parole du roi le décida ; mais il se repentit de sa confiance quand il s’aperçut que les soldats qu’on avait envoyés au-devant de lui et de son frère ne les perdaient point de vue. À leur entrée à Orléans, on ne leur rendit aucun honneur ; le soir même, le roi lui fit de violents reproches. Condé voulut se justifier. « Je ferai, dit le roi, tout examiner par les voies ordinaires de la justice », et on le conduisit en prison. On nomma des commissaires pour instruire son procès, et, sur leur rapport, il fut condamné à mort. De Thou dit que l’arrêt fut dressé et non signé ; mais les Guises avaient tellement animé le roi contre le prince, qu’on ne peut savoir où se serait arrêtée sa vengeance. Une maladie violente conduisit en peu de jours François II au tombeau, et les Guises, craignant les changements que pouvait amener un nouveau règne, après avoir tout employé pour perdre Condé, sollicitèrent les premiers sa grâce. Un arrêt du parlement le déchargea de toute accusation ; il reprit son rang à la cour, et Charles IX exigea qu’il se réconciliât publiquement avec le duc de Guise. Il obéit, mais cette réconciliation ne pouvait être durable ; le massacre de Vassy fut le sujet d’une nouvelle rupture. (Voy. Gaspard Ier de Coligny et François de Guise). Les protestants se plaignirent, et menacèrent d’appuyer par la force leurs réclamations. On désignait publiquement Condé comme leur chef. La reine Catherine de Médicis, qui avait cherché à se faire un appui du prince contre les triumvirs (voy. Catherine), n’osa pas le défendre contre eux, et il reçut l’ordre de s’éloigner de Paris. Les mécontents vinrent le joindre, et le pressèrent de se mettre à leur tète pour demander le renvoi des Guises et la liberté de conscience. Condé, se 1·en-Gant enfin ai leurs désirs, vint à Orléans, où il avait beaucoup de partisans, et il en fit sa place d’armes. Il écrivit de cette ville au roi et à la reine, qu’il était prêt à poser les armes si ses ennemis en faisaient autant, et aux princes d’Allemagne pour leur demander des secours d’hommes et d’argent. Les négociations entamées par la reine n’eurent aucun résultat ; l’armée des triumvirs se mit en marche et reprit successivement plusieurs villes sur les protestants. Condé, laissant la garde d’Orléans à Dandelot (voy. ce nom), marcha avec le reste de ses troupes sur Paris, et les négociations recommencèrent, mais avec aussi peu de fruit que la première fois, aucun des partis ne voulant rien céder de ses prétentions. La mauvaise saison força Condé d’abandonner ses projets sur la capitale et de se retirer ; il fut suivi par l’armée royale, qui l’atteignit près de Dreux (le 18 dé-