Page:Michaud - Poujoulat - Correspondance d’Orient, 1830-1831, tome 1.djvu/135

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tient point en propre et je ne puis ni le céder ni le vendre. Il a été conquis par les nobles hommes qui vinrent de France avec mon père, comme amis et comme compagnons d’armes. Ils se sont partagé les terres, la balancé à la main, et chacun a obtenu sa part, proportionnée à son rang et à sa puissance ; cette répartition faite, ils ont choisi mon père, comme le plus sage et le plus honoré, pour être chef sur eux tous ; mais ils ont en même temps établi des conventions, des chartes dressées par écrit, et d’après lesquelles il ne pouvait, à lui seul, rester le maître de rien faire au monde et devait suivre le conseil et la volonté de tous ses compagnons. Ainsi, quoique mes ancêtres aient contribuer à conquérir ce pays par leur épée, je dois dire que je n’ai pas le pouvoir de céder les provinces que je gouverne, car la charte de la conquête s’y oppose. »

Après ce discours, Guillaume fut reconduit en prison ; bientôt de nouvelles calamités vinrent fondre sur les Francs établis en Orient. Les Latins perdirent la ville de Constantinople, et cet empire, qui avait à peine vécu l’âge d’un homme ordinaire, acheva de périr de misère et de faiblesse. La captivité de. Guillaume et de ses compagnons d’infortune, qui durait depuis trois années, pouvait se prolonger long-temps encore, le désespoir affaiblit leur courage et dompta leur opiniâtreté. Enfin, le prince champenois consentit à céder, pour sa ran-