Page:Michaud - Poujoulat - Correspondance d’Orient, 1830-1831, tome 1.djvu/318

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la ville fut tout entière consumée par les flammes. Une grande partie de la population périt sous le fer, par le feu, ou dans les flots ; le reste fut dispersé ou vendu dans les marchés de Smyrne et des autres îles voisines. Dix ans se sont écoulés, et les ruines de Cidonie couvrent encore la terre. Un firman de la Porte a permis aux habitans fugitifs de rentrer dans leurs foyers déserts. Quelques-uns, dit-on, sont revenus ; on leur a rendu leurs terres et leurs oliviers qui ne se trouvaient point engagés aux mosquées. Nous avions sur l’Erminio un Grec de Smyrne, qui a passé dernièrement sur les ruines d’Aivali et qui avait vu cette ville dans son état florissant. Ses récits nous ont arraché des larmes. Rien n’est plus digne de compassion que les scènes tragiques qui accompagnèrent la destruction de la ville ; mais il y a peut-être quelque chose de plus douloureux dans le sort de ces exilés qui, revenant après une longue absence, ne retrouvent plus ni patrie, ni famille et cherchent vainement leurs tristes dieux pénates dans un amas de décombres.

Nous avions ainsi tout le loisir de nous livrer à nos souvenirs, et d’étudier ou de nous rappeler l’histoire des pays situés autour de nous. Enfin, le 11 juillet, à sept heures du soir, une légère brise s’est élevée et nous a poussés vers le cap Baba (l’ancien promontoire Lectos). L’Erminio se disposait a remonter le canal des Dardanelles, et