Page:Michaud - Poujoulat - Correspondance d’Orient, 1830-1831, tome 1.djvu/332

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chassés, et nous avons éprouvé un moment de joie en retrouvant cet asile que nous étions naguères si impatiens de quitter.

Dans la matinée, les vents contraires ont amené près de nous différens navires qui les uns venaient de Symrne, les autres de l’Archipel, d’autres de l’Afrique ; ceux-ci nous ont donné des nouvelles de l’expédition d’Alger, et, comme ces nouvelles étaient favorables à la France, nous avons bu à la santé de nos braves ce qui nous restait de vin de Mesotopos. Tous ces navires mouillés autour de nous animent notre solitude ; séparée du monde, et enfermés dans notre prison flottante, la vue d’une bannière européenne nous réjouit et nous rappelle la patrie.

La tramontane soufflait toujours ; nous sommes redescendus à terre pour visiter encore les ruines de l’ancien Erissus. Des soldats à l’œil farouche rôdaient çà et là comme des loups cherchant la brebis timide ; nous craignions à chaque instant qu’ils ne vinssent nous redemander la Lesbienne fugitive. L’aga d’Erisso va, dit-on, adresser des plaintes au consul d’Autriche à Castro pour forcer notre capitaine à rendre la femme qu’il garde à son bord. De son côté, le capitaine parait quelquefois se refroidir pour la belle musulmane et se repent de lui avoir donné asile ; cette jeune étrangère à bord de l’Erminio lui semble un mauvais augure pour notre voyage ; il se rappelle sans doute qu’Agamemnon, par son obstination à garder Briséïs dans sa tente,