Page:Michaud - Poujoulat - Correspondance d’Orient, 1830-1831, tome 1.djvu/384

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

et se trouve placé entre les villages d’Erkessi-Keui et d’Udjek-Keui. On remarque dans le voisinage le tombeau d’Ilus, si souvent cité dans l’Iliade ; il a perdu la colonne derrière laquelle Paris se tenait caché, pour lancer son javelot contre Diomède. Ce tumulus a soixante pieds de haut ; il est couvert de gazon. En voyant le tombeau d’Ilus, je me suis rappelé le voyage de Priam au camp d’Achille, et j’ai reconnu avec une certaine joie que pour nous rendre à Kounkalé, nous prenions le même chemin que le vieux roi d’Ilion.

On sait que le Scamandre se réunissait autrefois au Simoïs mais, dans le siècle dernier, on lui a ouvert un canal qui a changé son nom et son embouchure : il se jette maintenant dans la mer Egée, au-dessus du cap de Troie, à deux heures environ, au sud, du promontoire Sigée. Le nouveau canal est l’ouvrage d’un capitan-pacha, qui détourna ainsi les eaux du fleuve pour faire tourner des moulins, et pour arroser les terres d’un tchifflik, sans trop s’inquiéter de savoir si le Scamandre était le fils de Jupiter, et si un pareil changement dans le cours des fleuves de la Troade ne jetterait pas un peu de confusion dans la science et les recherches futures des géographes et des érudits. Une des singularités historiques de ce pays, c’est que les rives du Xante sont devenues l’apanage des capitans-pachas, et qu’un ministre de la Porte possède aujourd’hui une grande partie des domaines de Priam.