Page:Michaud - Poujoulat - Correspondance d’Orient, 1830-1831, tome 2.djvu/307

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La civilisation, et surtout celle qu’on emprunte, ne saurait faire des progrès rapides chez un peuple à qui on répète tous les jours qu’il est le premier des peuples, et dans une société qui se croit toujours le modèle des sociétés. Pour arriver d’ailleurs à une civilisation quelconque, il faudrait en avoir au moins une première idée et savoir ce que c’est ; ici notre civilisation est tout-à-fait comme une terre inconnue, comme un monde nouveau ; il est difficile de marcher droit vers un but qu’on ne connaît pas, et de marcher vite lorsqu’on ne sait pas précisèrent où l’on va ; il n’y a point de véritable zèle, parce qu’il n’y a point de conviction ; le sultan lui-même ne croit pas toujours à sa propre révolution ; de là ces hésitations qui ressemblent au découragement, et qui font croire quelquefois que tous les projets de réforme sont abandonnés.

Vous, savez quel fut l’enthousiasme qui suivit la chute des janissaires ; cet enthousiasme est tombé sans que le sultan Mahmoud en ait profité pour la révolution qu’il voulait faire. Il y a cinq ans que la réforme est commencée, et je ne crains pas de dire que, sous certains rapports, on est moins avancé que le premier jour. On a pu voir en Turquie ce qui est arrivé et ce qu’arrivera sans doute encore dans d’autres pays où les révolutions, au moins pour ceux qui les font, n’ont qu’une belle journée, c’est la première. Tout le monde est dans l’ivresse, parce qu’on croit que tout est là, que tout est fini ; lors-