Page:Michaud - Poujoulat - Correspondance d’Orient, 1830-1831, tome 3.djvu/30

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événemens politiques. Il m’a répondu que Dieu avait tout écrit d’avance dans le livre des destinées. Nous en sommes restés là. Le derviche que j’entendais parler ainsi me présentait un contraste frappant avec le mollah d’Eyoub ; l’un était rempli de crainte et de prévoyance ; l’autre montrait une aveugle sécurité. L’opinion du premier est celle d’un homme d’état, qui croit toujours devoir prendre des précautions avec l’avenir ; l’opinion du second est celle d’un religieux qui s’est retiré du monde, et qui s’abandonne à la volonté de Dieu ou du destin. Ce qu’il y a de plus remarquable, c’est que dans la nation, la politique du magistrat est celle du petit nombre, et que là grande majorité des Osmanlis pense comme le cénobite.

L’histoire nous apprend que le fatalisme dominait dans les esprits aux siècles héroïques de la Grèce, c’est une disposition qu’on remarque chez tous les peuples barbares, surtout chez les peuples qui commencent. Cette doctrine peut être bonne dans les jours heureux, dans les temps de progrès et de victoire, parce qu’elle ajoute a l’enthousiasme des peuples, et qu’elle les fait marcher plus vite. Mais, dans les temps de décadence, elle n’est plus bonne à rien ; elle nuit même plus qu’elle ne sert ; la confiance extrême dans le destin empêche qu’on ne fasse ce qu’il faut faire ; elle dérobe aux yeux d’un peuple les maux qu’il pourrait éviter, et la doctrine de la prédestination n’est plus alors, qu’un dernier