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Page:Michel-Ange - L’Œuvre littéraire, trad. d’Agen, 1911.djvu/171

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CORRESPONDANCE


VIII

Au même.
Rome, 1512.0000

Votre dernière lettre m’a appris comment vout les affaires à Florence. J’en savais déjà quelque ehose. Il faut patienter, se recommander à Dieu et se garder d’errement ; car ces adversités ne viennent pas d’une autre source, que de la superbe et de l’ingratitude. Je n’ai jamais connu gens plus ingrats et plus fiers que les Florentins. Si la justice arrive enfin, c’est à bon droit.

Les 60 ducats que vous me dites avoir à payer me semblent chose déshonnête j’en ai grand regret ; mais il faut prendre le mal en patience, autant qu’il plaira à Dieu. J’en écris à Julien de Médicis deux mots que vous trouverez inclus dans cette lettre. Lisez-les et, si cela vous plaît, portez-les-lui : vous verrez s’ils vous profitent. Dans le cas contraire, pensez, s’il se peut, à vendre ce que nous possédons, et nous irons vivre ailleurs. Si l’on nous fait pire, à nous, qu’aux autres, tâchez de ne point payer ; laissez-vous plutôt prendre ce que vous avez, et donnez-m’en avis. Mais si l’on traite vos égaux comme vous-mêmes, prenez patience et espérez en Dieu,

Vous me dites que vous avez pourvu à 30 ducats : prenez-en 30 autres de mon bien et envoyez-moi le reste à Rome. Portez-les à Boniface Fazi pour qu’il me les fasse payer ici par Jean Balducci. Faites-vous faire par Boniface un reçu de cet argent et joignez-le à votre prochaine lettre. Pensez à vivre, et, si vous ne pouvez avoir des honneurs terrestres comme nos autres citoyens, qu’il vous suffise du pain et vivez avec le Christ en paix et pauvrement. Ici, moi-même je vis mesquinement et je n’ai cure ni de la vie ni des honneurs, c’est-à-dire du monde, et je passe mes jours dans les plus grandes fatigues et dans mille soucis. Voici déjà près de quatorze ans que je n’ai pas eu une heure de bien-être ; tout ce que j’ai fait n’a eu pour but que de vous venir en aide, et vous ne l’avez jamais su ni cru. Que Dieu vous pardonne tous. Je suis prêt à faire encore de même, aussi longtemps que je vivrai et que j’en aurai la force.

0000(Musée Britann.)



IX

Au même.
Florence, 1516 ou 1517.0000

J’ai été bien surpris, à votre égard, l’autre jour, quand je ne vous ai pas trouvé à la maison. Et aujourd’hui que j’apprends que vous vous plaignez de moi, et que vous dites que je vous ai chassé de chez vous, je m’étonne bien davantage. Je suis sûr que jamais, depuis le jour où je naquis jusqu’à présent, il ne m’est venu à l’esprit de faire rien qui vous fût contraire. C’est par amour pour vous que j’ai enduré toutes les fatigues, et vous savez bien