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MICHEL-ANGE.


XII

30 juin 1515.0000

Un de ces jours derniers, comme je passais devant la banque des Borghenni, le caissier m’a dit qu’il avait à me payer certains deniers, venus à mon adresse. Je n’ai pas voulu les toucher avant que je n’aie reçue de toi une lettre m’indiquant la quantité. J’ai écrit aussi la lettre que tu m’as demandée. Je sais qu’elle n’allait pas bien, parce que ce n’est pas ma profession d’écrire et que je n’ai pas la tête à la littérature. Rien de plus, pour aujourd’hui.

0000(Musée Britann.)



XIII

Rome, 8 sept. 1515.0000

Tu m’écris, comme si tu croyais que j’ai plus de soucis qu’il ne convient des choses de ce monde. Eh oui ! j’ai plus de soucis pour vous que pour moi-même, ainsi que j’ai toujours fait. Je ne cours pas après les fables et je ne suis point du tout un fou, comme vous le croyez. Je pense même que vous prendrez plus de goût aux lettres que je vous ai écrites, quand quelques années seront passées dessus, que vous ne le faites à présent, si je ne me trompe. Et si je me trompe, ce n’est point chose mauvaise ; parce que je sais qu’en tout temps il est bon d’avoir souci de soi et de ses affaires. Je me rappelle que tu voulais prendre un certain parti, il y a environ dix-huit mois, plus ou moins, je ne le sais. Je t’écrivis alors que ce n’était pas encore l’heure, et que tu devais laisser passer un an, par égard pour toi-même. À quelques jours de là, mourut le roi de France. Tu me répondis ou m’écrivis ensuite que, le roi étant mort, il n’y avait plus de péril pour l’Italie, et que je n’en finissais pas avec mes fables ; enfin tu te moquais de moi. Tu vois pourtant que le roi n’est pas mort et qu’il vaudrait bien mieux pour nous que, depuis plusieurs années, vous puissiez gouverner à ma manière. Mais assez là-dessus.

0000(Arch. Buonarroti.)



XIV

15 nov. 1516.0000

J’ai appris par ta lettre que notre père Ludovic a failli mourir, mais que le médecin a dit dernièrement que le malade était hors de danger, si rien d’autre ne survenait. Puisqu’il en est ainsi, je ne me mettrai pas en route, parce que cela m’est très désagréable. Si notre père eût été en danger, j’aurais voulu le voir à toute force avant qu’il ne mourût, dussé-je en mourir avec lui. Mais j’ai bon espoir qu’il se portera bien, et je ne viendrai pas. Si, par hasard, il arrivait qu’il rechutât, — ce dont Dieu le garde et nous aussi, —