Page:Michel - Contes et légendes.djvu/46

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Seulement n’en sachant pas plus long, il avait toujours ajouté et rarement effacé, de sorte que le compliment avait seize pages.

Les quinze premières servaient d’exorde et la seizième était le discours.

Si on vous débitait, chers enfants, une chose pareille à votre louange, il est probable que vous seriez pris d’un fou rire et je le comprends.

Mais le père Remy ne pensa qu’à la bonne volonté qu’on y avait apportée ; il oublia le burlesque des phrases et les larmes lui vinrent aux yeux en songeant à tout le mal que ces braves gens s’étaient donné.

Ce que voyant, la mariée qui avait fait depuis huit jours répéter le compliment à son fiancé au moins vingt fois à chacune de ses visites, s’avança vivement et dit au père Remy : Moi aussi, monsieur le maître, je sais le compliment aussi bien que Jean Paul ! et là dessus elle le recommença d’un bout à l’autre.

Heureusement Thérèse allait encore plus vite que Jean Paul, elle fut promptement au bout ; mais il fallut néanmoins entendre de nouveau toutes les comparaisons depuis les premiers mots : « Je chante les vertus de vous, Monsieur Remy » jusqu’aux derniers « Pardonnez à ma faible muse ses non pompeux tableaux ! »

On y avait joint un envoi de quatre vers qui devaient courir vite à la prospérité, car c’était de vrais mille pieds. Puisqu’on fait des vers de douze syllabes pour les grands sujets, avait dit le père Christophe, ce sera bien plus beau