Page:Michel - La Reliure française, 1880.djvu/108

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mêlés à tant d’illustres victimes sous les coups du fanatisme ? Ce qui rend cette supposition probable, c’est que non-seulement on ne rencontre plus de reliures sorties de ces mains qui avaient produit tant de chefs-d’œuvre, mais leur matériel, leurs outils disparaissent aussi dans la tourmente, et la tradition est rompue.

La sinistre période de persécution contre les artisans huguenots, qui va de 1562 à 1570, les avait décidés à quitter la capitale ; se sont-ils, comme beaucoup d’autres, réfugiés à l’étranger ?

Le seul mode de décoration qui ait survécu en Reliure à la Renaissance proprement dite est l’usage des coins et milieux azurés, et des grands cartouches. Tirés à la presse, ces motifs n’ont de valeur artistique que le mérite du dessin et de la gravure. La manière toute spéciale dont ils ont été gravés, le modelé, le rendu des ombres, font supposer qu’ils sont l’œuvre des artistes qui ciselaient et gravaient les armures dont le seizième siècle nous a légué de si beaux spécimens[1]. Malheureusement ces fers sont tirés sur de mauvais cartons, et les épreuves sur cuir en sont lourdes et pâteuses ; les plats fléchissaient sous la pression que nécessitait le tirage. Pour juger de leur valeur artistique, il faut les voir sur ces vélins si fins dont on trouve encore, de nos jours, des exemples d’une parfaite conservation.

Ces reliures, vu la facilité de leur exécution, devaient être d’un prix peu élevé ; elles furent très-employées sous le règne de Charles IX et pendant tout le seizième siècle.

La marque de Charles IX était faite de deux colonnes

  1. Un seul graveur moderne a atteint, pour le fer à dorer, une perfection aussi grande ; mais c’est un spécialiste, le graveur Baticle.