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Page:Michel - La Reliure française, 1880.djvu/136

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dont nous venons de parler, les ornèrent de milieux qui furent le point de départ des reliures rayonnantes de le Gascon. Ils se servirent même d’un petit nombre des nouveaux fers dans leurs plus riches volumes, en conservant les entrelacs des Fanfares. Quelques-uns de ces spécimens sont d’une exécution excellente. Les poëtes Horace, Perse, Juvénal (1612, 1614, 1616), réunis en un seul volume au monogramme de de Thou, J. A. G., Jacques, Auguste, Gasparde, ont été revêtus d’une reliure de ce genre, qui est un petit chef-d’œuvre. (Bibliothèque nationale.)

Malgré tout l’intérêt qu’ils présentent, ces essais pouvaient, tellement ils sont timides, demeurer sans résultat, si dans la seconde partie du règne de Louis XIII ne venait se révéler le dernier des grands doreurs anciens, le Gascon ! Quand un artiste de cette valeur apparaît, il résume en un instant les efforts précédemment tentés, et l’on pourrait croire, en voyant son œuvre à deux siècles et demi de distance, qu’elle est sortie tout entière de sa seule imagination. Après avoir révolutionné son art et brillé du plus vif éclat, il a laissé une voie nouvelle et une immense moisson à recueillir.

Ce qui fit la véritable force de le Gascon, c’est qu’il ne fut pas seulement un novateur heureux, mais qu’il était, par son éducation première, un artiste de science et de tradition. Ayant vu dans sa jeunesse toutes les reliures de la bibliothèque de de Thou, étant peut-être même l’élève des relieurs qui les exécutaient (il nous semble, en effet, difficile que l’on puisse avoir des qualités aussi semblables, des procédés aussi identiques sans avoir vécu côte à côte), le Gascon ne dégagea que progressivement sa personnalité.