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LA MISÈRE

175 Mais, dit Hector, un peu effrayé, nous avons peut-être risqué gros, à ce jeu là ? — Il est vrai que vous eussiez mieux fait de laisser le revolver dans votre poche, mais baste ! l’endroit est désert, l’affaire s’est passée sans témoins et j’ai l’ordre d’arrêter un certain démagogue d’origine étrangère qui doit être expulsé dans les vingt-quatre heures. · Mais alors vous êtes de… ? De la police, oui, monsieur le comte, pour le service de l’Église — Très bien, mais quel rapport ? — Nous mettrons l’affaire sur le compte d’une erreur et il n’en sera que ça. Vous plaisantez. — Pas le moins du monde. Ne suis-je pas aussi irresponsable que M. le préfet de police lui-même, des erreurs que je puis commettre ? Mais comment donc, mon cher, sous un gouvernement républicain ? Monsieur le ministre de l’intérieur nous couvre tous de son ombre et de l’impunité dont il jouit. Très bien ! très bien ! votre république a du bon, tout de même. Assurément, pour qui sait s’en servir. Quant à la recherche des papiers dans la cabane de notre conspirateur, elle s’explique d’elle-même. En vérité, Nicolas, vous êtes un homme précieux. — Vous voudrez bien en témoigner devant qui de droit. Oui, à charge de revanche. Si jamais nous avons le bonheur d’asseoir notre roy sur son trône, souvenez-vous, comte, que je puis faire comme un autre, mieux qu’un autre peutêtre, un excellent préfet de police. Je me sens toutes les aptitudes de l’emploi. Au besoin, je m’en souviendrai. Ils entrèrent dans la cabane demeurée ouverte et commencèrent à chercher. La clef était à l’armoire que les deux complices ouvrirent. Au-dessus d’une masse de papiers, le premier objet qui frappa leurs yeux, fut le billet de mille francs confié à Léon-Paul pour être remis à Angèle. Nicolas, l’œil allumé par une telle découverte, s’empressa de mettre le billet dans son portefeuille disant que c’était là une véritable pièce à conviction. Et il commença à bouleverser l’armoire, dans l’espérance d’en trouver d’autres. L’armoire était pleine de cahiers, dont le titre de quelques-uns, fut un véritable sujet de joie pour les deux agents des jésuites. Ils mirent de côté pour les livrer à leurs maîtres, avant de les porter à la police, une petite liasse dans laquelle se trouvaient les opuscules suivants : LA FIN DES RELIGIONS MÉTAPHYSIQUES LA CONSPIRATION DU BON SENS GUERRE AUX ÉTEIGNOIRS RECHERCHES DES LOIS SOCIOLOGIQUES RÉVOLUTION PAR L’ÉDUCATION LA FIN DES GOUVERNEMENTS ACTUELS