Page:Michel Corday - La Houille Rouge, 1923.djvu/31

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listes seront convoqués au Quai d’Orsay dans la nuit.

Un flot d’espoir inonde Mme Ciboure. Son fils sauvé… et tant de pauvres petits avec lui…

Mais une des invitées, qui porte un collier où des balles de shrapnell alternent avec de grosses perles, crie :

— La paix ! Jamais !

Et les hommes éclatent en un concert farouche. Tous hurlent les mêmes paroles : « Mensonge ! Manœuvre ! Piège grossier ! Amorce empoisonnée ! Paix allemande ! » Ce sont les mots mêmes, les mots d’ordre qu’adopteront le lendemain la presse et le gouvernement, pour flétrir cette paix dont ils ne connaissent même pas les conditions.

Alors, Mme Ciboure comprend que ces hommes prolongeront la guerre — même si cette prolongation doit frapper l’univers entier d’une mortelle anémie — parce que leurs buts mercantiles, leurs fameux buts qu’ils refusent de faire connaître, ne sont pas encore atteints.

Elle comprend que son fils partira demain, et qu’elle devra commencer de gravir son calvaire.

Et alors elle se rappelle les paroles indignées dont Paron flétrissait ces féodaux qui, sous des couleurs éclatantes et trompeuses, sacrifient des