Page:Michel Corday - La Houille Rouge, 1923.djvu/77

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parce que vous n’avez jamais remporté de victoire stratégique ». Devant ce manque de foi, le chef suprême aurait menacé de sa démission. Puis on s’évada de la technique. Abandonner l’offensive, ne serait-ce pas décourager les soldats, gorgés d’espérance ? Ne serait-ce pas permettre aux Allemands de frapper où bon leur semblerait un front dégarni ? L’extension de la guerre sous-marine permettrait-elle une longue patience ? Enfin, une âpre voix fit valoir l’intérêt d’une victoire purement nationale, remportée avant l’arrivée des Américains, et qui ne leur dût rien…

Aujourd’hui, les excuses pleuvent. J’entends des lambeaux de phrases : l’abstention russe ; le repli allemand ; la préparation insuffisante, qui laissait intactes les défenses et les mitrailleuses ennemies ; le mauvais temps, dont souffrit l’observation aérienne ; les ordres d’opérations d’une armée découverts par les Allemands, dix jours avant l’attaque, sur le cadavre d’un sergent… Que sais-je encore ?

Bref, la bataille apaisée, sur les morts innombrables une vilaine clameur s’élève, tout un croassement où s’entrechoquent les intérêts politiques et les ambitions militaires, les vanités déçues et les responsabilités inquiètes…