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Est-ce ainsi, de nos jours, que naît la guerre ?

8 octobre 1915.

J’ai enfin revu Paron, que j’avais avisé de notre retour. Je l’ai grondé de n’être pas venu à Ganville, de m’avoir si peu écrit pendant ces deux mois. Amical et bon, il a cependant gardé cette contrainte, insaisissable et certaine, que j’ai déjà notée. Sa gêne m’a gagnée. Je n’ai pas osé m’expliquer à fond avec lui. Encore hantée par la lecture des documents belges, je les lui ai montrés. Il les connaissait. Je lui dis la vision qui m’en restait, ces deux petites troupes d’énergumènes qui, se dépassant dans l’invective, s’effrayaient mutuellement et enfin mettaient aux prises les innombrables et paisibles témoins de leur duel de paroles. Je lui demandai si le tableau lui semblait exact. À ma vive surprise, cette simple question accrut son embarras. Son front chauve rougit, son nez se pinça. Ce sont chez lui les signes de l’émotion. Il me répondit enfin d’une voix tendue :

— On peut en effet, imaginer ainsi le prologue du grand drame. Mais, comme dans toute pièce,