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— Que voulez-vous ? C’est trop long…

20 octobre 1916.

Une délicieuse pensionnaire de l’Odéon habitait une villa près de Meaux. Au début de la guerre, devant l’invasion, elle dut l’abandonner. Comme sauvegarde, à tout hasard, elle étendit sur la table du salon une affiche de Vieil Heidelberg — une pièce traduite de l’allemand où elle avait joué, — et prit soin d’y souligner son nom. Après la victoire de la Marne, elle rentre dans sa villa, la trouve intacte, un gros bouquet posé sur l’affiche.

Naturellement, on ne publie pas cette histoire, puisqu’on ne doit montrer de l’ennemi que ses ignominies. Je continue de penser qu’on aurait dû tout étaler, les traits généreux comme les traits affreux, qu’on aurait dû conter l’aimable anecdote du bouquet comme on a rapporté les abominables déportations d’avril dernier, dans le Nord, ces familles brutalement triées, séparées par les Allemands, ces jeunes filles envoyées vers un but inconnu…