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Mes deux fils dans l’artillerie »… Ces galas inévitables m’attristent toujours. Par une sorte de réflexe, tandis que défilent le Pilaff à la Newburgh, les Ramereaux à l’Italienne et la Bombe à la Montmorency, j’évoque la pauvre pitance qui parvient jusqu’aux tranchées, quand elle y parvient. Mais ce soir, la pensée de René ne me quittait pas. Dans huit jours, il part pour le front.

Je me fais grâce des réflexions que m’inspirait, en un tel moment de ma vie, la réunion de ces hommes dont je sais la secrète influence…

La soirée se traînait entre femmes, quand ils sortirent tous du fumoir, en masse et en tumulte. Un coup de téléphone venait de leur apprendre que l’Allemagne proposait la paix… La note allemande était arrivée dans l’après-midi. On se décidait à publier la nouvelle. Les journalistes seraient convoqués dans la nuit.

Quel flot d’espoir m’inonda… J’aurais voulu prier, ou danser… René sauvé, et tant de pauvres petits…

Mais une femme — je la vois encore — qui portait un collier où des balles d’acier alternaient avec les perles, cria :

— La paix !… Jamais.

Je n’eus pas le temps de m’arrêter à l’absur-