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LES « HAUTS FOURNEAUX »

ce livre un exposé très loyal des forces pacifiques en Allemagne, un an avant la guerre. Il s’étonnait de leur nombre et de leur diversité. Il en avait également relevé la liste : la partie éclairée de la noblesse ; les classes dirigeantes de tous les États du Sud, hostiles à la politique prussienne ; les sept millions d’Allemands annexés, Alsaciens, Danois, Polonais, également en rébellion contre la Prusse ; le moyen commerce, la moyenne industrie, la moyenne finance, pour qui la guerre serait la banqueroute ; la masse profonde des artisans, des ouvriers, des paysans. Quelle minorité nocive avait donc pu pervertir le nombre et l’entraîner ?

Il me dit enfin l’impression d’ensemble que lui laissait la lecture du Livre Jaune et d’extraits des Livres Blanc, Bleu, Orange et Gris, publiés par les autres belligérants. Dans la période de tension, chaque gouvernement tremblait d’être en retard sur le voisin dans l’énorme travail d’une mobilisation totale. Sous l’empire de cette crainte panique, ils se dépassaient sans cesse les uns les autres dans leurs préparatifs plus ou moins secrets. Ils s’inspiraient une mutuelle terreur. Chacun faisait état de la hâte d’autrui pour se hâter davantage. Et ce jeu d’émulation affolée, de tragique surenchère, les jetait fatale-