Page:Michelet - Œuvres complètes Vico.djvu/442

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ment la mère des vertus domestiques et civiles ; la religion seule nous apprend à les observer, tandis que la philosophie nous met plutôt en état d’en discourir.

La vertu commença par l’effort. Les géants enchaînés sous les monts par la terreur religieuse que la foudre leur inspirait s’abstinrent désormais d’errer à la manière des bêtes farouches, dans la vaste forêt qui couvrait la terre, et prirent l’habitude de mener une vie sédentaire dans leurs retraites cachées, en sorte qu’ils devinrent plus tard les fondateurs des sociétés. Voilà l’un de ces grands bienfaits que dut au ciel le genre humain, selon la tradition vulgaire, quand il régna sur la terre par la religion des auspices. Par suite de ce premier effort, la vertu commença à poindre dans les âmes. Ils continrent leurs passions brutales, ils évitèrent de les satisfaire à la face du ciel qui leur causait un tel effroi, et chacun d’eux s’efforça d’entraîner dans sa caverne une seule femme dont il se proposait de faire sa compagne pour la vie. Ainsi la Vénus humaine succédant à la Vénus brutale, ils commencèrent à connaître la pudeur, qui, après la religion, est le principal lien des sociétés. Ainsi s’établit le mariage, c’est-à-dire l’union charnelle faite selon la pudeur et avec la crainte d’un Dieu. C’est le second principe de la science nouvelle, lequel dérive du premier (la croyance à une Providence).

Le mariage fut accompagné de trois solennités. — La première est celle des auspices de Jupiter, auspices tirés de la foudre qui avait décidé les géants à les observer. De cette divination, sortes, les Latins définirent le mariage, omnis vitæ consortium, et appelèrent le mari et la femme consortes. En italien, on dit vulgai-