avons dû réserver la plupart des cartes pour les membres de notre patronage.
La majorité du public était composée, en effet, de jeunes gens entre dix-sept et vingt ans, mais il se trouvait aussi des hommes d’âge mûr, des femmes portant la coiffe nantaise en forme de corne de mousseline raide, finement tuyautée, épinglée à plat sur le ruban de velours noir qui serre la tête. Il y avait aussi des jeunes filles en chapeau, modistes, tailleuses ou « factrices » de grands magasins, ouvrières de fabriques, parentes ou amies des membres du patronage… De gais propos s’échangeaient de groupe en groupe, on s’offrait des bonbons dans des sacs de papiers jaunes, des tranches d’une orange écartelée.
— Regarde à droite, me commanda Henri, dernière rangée de chaises.
— Quelle est cette jeune femme voilée ?
— Je ne la connais pas.
— Alors, pourquoi me la désignes-tu ?
— C’est sur sa voisine que j’attirais ton attention.
— Qui est-ce ?
— Marthe Leray. Une personnalité étrange, sympathique, connue et vénérée « sur les Ponts », à l’égal… oui, d’une sainte… une sainte libre-penseuse, hélas !…
Mais, je n’écoute pas, je demeure l’œil rivé à cette toile trouée, haletant, me refusant à croire