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Page:Michelet - Comme jadis, 1925.djvu/149

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COMME JADIS…

mes fiertés. J’eus peur de moi-même. Mon regard effleura la petite toque de chinchilla, je vis vaguement la frange rousse des cheveux mêlée à la fourrure, les lèvres s’entrouvrir sur la ligne des dents, pour un sourire. Jacqueline n’ignorait plus que sa présence m’était connue…

Viendrait-elle à moi après le rideau abaissé, entendrais-je sa voix chaude se répandre en paroles de félicitations où sa sincérité n’aurait aucune part ? M’expliquerait-elle avec son apparente franchise naïve sa présence, ici, ce soir ?

— Attends-toi à être assailli de questions, m’avait averti Maignan.

En effet, à l’issue de la conférence, le petit bureau fut envahi. Je répondis de mon mieux aux effusions, aux questions les plus invraisemblables sur ce Canada d’épopée que plusieurs croyaient que j’avais visité. Je pris des adresses, je promis des renseignements ; je dus même m’engager pour une nouvelle conférence. Je m’impatientais que d’autres arrivants prissent aussitôt la place de ceux qui se retiraient. Jacqueline n’oserait venir, se mêler à ces groupes d’où les exclamations s’élevaient peu choisies. J’espérais et je redoutais à la fois son apparition… Quelle attitude aurais-je en face d’elle ? Le passé était mort, je le sentais dans chacune de mes fibres, malgré les contradictions de mon misérable cœur.

— Tu l’attends ?