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LA GAULE SOUS L’EMPIRE. DÉCADENCE DE L’EMPIRE.

disait le disciple d’Origène, le maître de Pélage, l’audacieux Théodore de Mopsueste, je ne lui envie rien en cela ; ce qu’il est devenu, je puis le devenir par les forces de ma nature. »

Cette doctrine, toute empreinte de l’héroïsme grec et de l’énergie stoïcienne, s’introduisit sans peine dans l’Occident, où elle fût née sans doute d’elle-même. Le génie celtique, qui est celui de l’individualité, sympathise profondément avec le génie grec. L’Église de Lyon fut fondée par les Grecs, ainsi que celle d’Irlande. Le clergé d’Irlande et d’Écosse n’eut pas d’autre langue pendant longtemps. Jean le Scott ou l’Irlandais renouvela les doctrines alexandrines au temps de Charles le Chauve. Nous suivrons ailleurs l’histoire de l’Église celtique.

L’homme qui proclama, au nom de cette Église, l’indépendance de la moralité humaine, ne nous est connu que par le surnom grec Pélagios (l’Armoricain, c’est-à-dire l’homme des rivages de la mer[1]). On ne sait si c’était un laïque ou un moine. On avoue que sa vie était irréprochable. Son ennemi, saint Jérôme, représente ce champion de la liberté comme un géant, il lui attribua la force, la taille, les épaules de Milon

    exacte proportion entre la faute et la peine ; elle rendait l’homme seul responsable ; mais la terrible question revenait tout entière : il restait toujours à expliquer comment le mal avait commencé dans une vie antérieure.

  1. On l’appelait aussi Morgan [môr, mer, dans les langues celtiques). — Il avait eu pour maître l’origéniste Rufin, qui traduisit Origène en latin et publia pour sa défense une véhémente invective contre saint Jérôme. Ainsi Pélage recueille l’héritage d’Origéne.