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RÉCAPITULATION. — SYSTÈMES DIVERS.

vieilles populations celtiques, assises aux roches paternelles et dans la solitude de leurs îles, restent fidèles à la poétique indépendance de la vie barbare, jusqu’à ce que la tyrannie étrangère vienne les y surprendre. Voilà des siècles que l’Angleterre les y a en effet surprises, accablées. Elle frappe infatigablement sur elles, comme la vague brise à la pointe de Bretagne ou des Cornouailles. La triste et patiente Judée, qui comptait ses âges par ses servitudes, n’a pas été plus durement battue de l’Asie. Mais il y a une telle vertu dans le génie celtique, une telle puissance de vie en ces races, qu’elles durent sous l’outrage, et gardent leurs mœurs et leur langue.

Races de pierres[1], immuables comme leurs rudes monuments druidiques, qu’ils révèrent encore[2]. Le jeu des montagnards d’Écosse, c’est de soulever la roche sur la roche, et de bâtir un petit dolmen à l’imitation des dolmens antiques[3]. Le Galicien, qui émigré chaque année, laisse une pierre, et sa vie est représentée par un monceau[4]. Les highlanders vous disent en signe

  1. Telle terre, telle race. L’idée de la délivrance, dit Turner, ravissait les Kymrys dans leur sauvage pays de Galles, dans leur paradis de pierres ; stony Wales, selon l’expression de Taliesin.
  2. J. Logan : « Les Gaëls remarquent soigneusement que ceux qui ont porté la main sur les pierres druidiques n’ont jamais prospéré. »
  3. Logan : Clach cuid fir, c’est lever une grosse pierre du poids de deux cents livres environ, et la mettre sur une autre d’environ quatre pieds de haut. Un jeune homme qui est capable de le faire est désormais compté pour un homme, et il peut alors porter un bonnet. — Ne semble-t-il pas que les cromlehs soient les jeux des géants ?
  4. Humboldt, Recherches sur la langue des Basques.