Page:Michelet - La Mer, 1875.djvu/395

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

teurs, — non fades, enivrantes, comme celle des dangereuses roses, — mais agréablement amères. Asseyez-vous au milieu d’elles, et comme elles, bien abritée, par ce léger pli de terrain. Ne dirait-on pas qu’on est ici à cent lieues de la mer ? Aspirez-les, ces purs esprits, l’âme de ces sauvages fleurs, vos sœurs par la pureté. Cueillez-en, s’il le faut, madame. Elles ne demandent pas mieux. Un peu rudes, mais si suaves ! elles ont ce singulier mystère dans leur parfum virginal, de calmer et d’affermir. Ne craignez pas de les cacher dans votre sein, sur votre cœur.



N’oublions pas de remarquer que ces landes abritées sont brûlantes à certaines heures. Elles absorbent, elles concentrent les rayons du soleil. La faible femme y sécherait. La jeune fille, riche de vie, s’enflammerait, bouillonnerait, aurait de redoutables fièvres. Sa tête se perdrait de mirages étonnants et dangereux. Pour y aller, il faut choisir des jours couverts, moites et doux ; ou bien se lever de bonne heure, quand tout est frais, quand le thym garde un peu de sa rosée, lorsque le lapin agile erre encore et fait tous ses tours.