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Page:Michelet - La femme.djvu/433

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l’humidité du logis avait commencé la fièvre, que les brouillards de Paris ne valaient rien à un homme qui avait longtemps respiré l’air vif et froid du Cantal. Il lui dit qu’il lui couperait sa fièvre, mais qu’elle reviendrait, s’il ne retournait au pays. Le charbonnier ne dit rien, sa fièvre augmenta.

Une dame du voisinage que la charbonnière fournissait, vit que, derrière l’observation judicieuse du médecin, il y avait pourtant autre chose. Et elle lui dit : « Ma petite, sais-tu pourquoi ton mari a la fièvre, et la gardera et l’aura de plus en plus ? c’est parce que tes jolis yeux aiment trop à être regardés… Et sais-tu pourquoi la fièvre a augmenté ces jours-ci ? c’est par le combat que se livrent en lui l’amour et l’avarice. Il croit gagner trop peu là-bas. Il ne pourra pas s’en tirer. Il restera et mourra. »

Ni la femme, ni l’homme, n’auraient jamais pris un parti. Ce fut la dame qui le prit. Elle avertit les parents qui, de là-bas firent écrire au charbonnier que son bien était en mauvaise main, qu’il dépérissait ; que, pendant qu’il croyait faire à Paris de bonnes affaires, il se ruinait en Auvergne. Cela réveilla notre homme, trancha tout. Il n’eut plus de fièvre, céda sa petite boutique, emmena sa petite femme, partit. Tous deux furent sauvés.