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Page:Michelet - Mon journal, 1888.djvu/327

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MON JOURNAL.


que la solitude, un grand silence. Mais une nuit, doucement étoilée, où je suis assis tristement sur la balustrade de mon tombeau, une voix me parle, mais si basse, si douce, rien qu’un souffle qu’une ombre seule peut ouïr : « Ami, tu n’es pas seul ! » Ce serait là le point de départ. Bientôt viendraient le printemps et le réveil dans l’amour, de ceux que la mort a séparés en pleine jeunesse, en pleine vie. Rien de plus poétique que la description de ce moment idéal où le cimetière est englouti sous les fleurs. On les verrait, ces âmes éprises, monter deux à deux et fuir dans t’espace, non pas comme nous les peint Dante, emportées dans la tourmente, mais heureuses. Ici, point d’enfer, rien que le paradis. N’est-il pas dans le cœur de ceux qui aiment ?...

Après les ardentes amours de l'été, viendraient les mélancolies de l’automne, la chute des feuilles et les pensées de séparation. Tout cela, ennobli par les grandes assemblées des morts dans l’attente du jugement.

Que de choses à dire ici sur les pressentiments de la vie future. Mon cœur autant que mon esprit y fournirait. Je sens Dieu une mère, pour toutes ces âmes qui vont à lui, comme les petits enfants, en tendant les bras.... Ce livre plein d’émotion ferait aimer la mort [1].

  1. Vers la fin de sa vie, M. Michelet reprit cette idée féconde